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Catégorie : Le Réceptif d’après-demain

Le tourisme dans la perspective de l’effondrement ou un tourisme de l’effondrement…

Par William Wadoux, 49 ans, associé gérant de Terra Andina Ecuador depuis 6 ans, basé à Quito en Équateur.

Diplômé ingénieur télécoms, 7 ans chez Alcatel, Thales en tant que Chef de Projet, 2 ans dans une galerie d’art contemporain, 8 ans en ONG (Latitud Sur), passionné d’Amazonie, de ses populations (conseiller quelques mois au Ministère de l’Agriculture en Équateur sur la légalisation de territoires indigènes) et d’Agro-écologie.
william.wadoux@terra-group.com


Miroir, miroir en bois d’ébène, dis-moi, dis-moi que je suis la plus belle

Il n’est pas de débat sérieux sur le sujet de l’effondrement de la société et du changement climatique qui ne commence par la question radicale bien personnelle « Dois-je continuer à travailler dans le tourisme ? ». Notre secteur n’y échappe pas, comme bien d’autres, car il n’est pas que peu d’activité qui ne consomme de l’énergie et ne participe à sa mesure à la génération de gaz à effet de serre. On peut toujours relativiser… l’industrie du tourisme participerait à hauteur de 5 à 8% des émissions (les chiffres varient selon les sources et les activités incluses).
On peut toujours considérer le fait que c’est la part du transport aérien qui pèse le plus dans nos voyages et que de ce fait nous n’en sommes directement responsables et ne pouvons influer sur ce fait… ou encore que les avions partiraient sans doute même sans nos clients ou que ce sont ces derniers qui nous poussent à leur proposer des services polluants.

Bref, il y a de nombreux stratagèmes pour alléger la tension schizophrénique provoquée par cette question mais en tant qu’acteur économique responsable, se regarder dans le miroir est un acte essentiel, d’honnêteté intellectuelle, désormais devenu nécessaire et imprégné d’urgence selon le niveau de pessimisme avec lequel on enrobe sa vision de l’avenir sociétal qui nous attend, sans même considérer le scénario le plus dramatique.

Avant d’envisager des pistes de réflexion supplémentaires, il y a une seconde question à laquelle il semble fondamental de répondre afin de se positionner dans le débat général.

Croissance ou décroissance, toujours plus ou beaucoup moins ?

Je vais faire l’impasse sur la vision des climato-sceptiques, dont le débat ne se fonde pas sur des arguments scientifiques mais sert à mon sens des intérêts mortifères, distillant de manière fallacieuse le doute sur une situation d’extrême urgence.
L’information désormais circule en abondance autour des risques systémiques majeurs qu’encourent nos sociétés pour que nous ayons tous conscience de scenarii potentiels qui nous menacent à l’échelle de l’humanité. La complexité des simulations réalisées grâce à l’aide de données et de modélisations de plusieurs dizaines de milliers de scientifiques ne permet pas de déterminer avec certitude le type de scénario ou les dates d’occurrence des évènements. Mais une fois passée la phase de doute (en effet peu d’arguments scientifiques viennent contredire les principales conclusions de ces prédictions), il est fort probable que vous acquériez la conviction que la société souffrira de conséquents changements, provoqués par une crise de l’énergie, un effondrement du système financier, des conflits militaires, la disparition des derniers écosystèmes, des catastrophes climatiques majeures ou une pandémie.

Si vous en êtes là, il vous faudra prendre parti pour les partisans de la croissance (même si verdie pour coller à la nécessité de diminuer nos impacts) ou pour le camp des décroissants.
Le premier suit la philosophie du « business as usual », on ne change rien ou presque, on interdit l’usage des pailles à la cantine des usines Seveso, on continue à produire, notamment des équipements de transport moins énergivores et des systèmes de production d’énergie non fossile. On reste dans le modèle d’une croissance continue dans un monde aux ressources finies, avec des solutions techniques qui viendront résoudre nos différents défis.
Le deuxième fait le constat des pics passés ou à venir des ressources qui permettent cette production et conclut au fait qu’en dépit des meilleures avancées scientifiques, nos besoins matériels inévitablement croissants dans le modèle actuel amènent à une impasse.
Puisque mes convictions m’amènent à adhérer au second groupe, je vais développer les arguments qui sous-tendent cette position. Le mythe d’une croissance infinie dans un monde matériel fini, aux ressources comptées est un contresens logique. C’est du storytelling hérité de l’âge industriel, ayant bercé les générations antérieures, et duquel nous avons du mal à nous extraire tant il sert d’intérêts personnels et en dépit de son caractère nettement prédateur.
De nombreuses ressources ont passé leur pic ou sont en passe de le faire : celui du pétrole est déjà connu, mais c’est aussi le cas de l’argent (nécessaire à la fabrication des pales des éoliennes), de nombreux métaux rares (pour les ordinateurs et téléphones portables). Sans oublier par exemple les phosphates tant nécessaires à l’agro-industrie qui a rendu nos sols agricoles addictifs aux engrais chimiques. Sans énergie et avec des ressources en diminution (ou raréfiées et très coûteuses), comment alimenter la croissance de la consommation avec une population en augmentation vertigineuse (voir chiffres Afrique) ?
Cette décroissance sera ainsi subie (pour les sceptiques, les résignés ou les passéistes) ou préparée (les optimistes actifs).

Le tourisme à l’époque de l’apocalypse annoncée

Le voyage a de nombreuses vertus que l’on connaît : la rencontre avec d’autres humains aux conceptions du monde très différentes, donc forcément bénéfique si l’on veut s’essayer à changer de paradigmes ; vivre la beauté du monde pour prendre conscience de l’importance de le sauvegarder ; permettre à des sociétés de maintenir des modes de vie ou des lieux grâce aux revenus du tourisme, etc…

Dans la course à la compétitivité qui caractérise la société dans laquelle nous sommes immergés, arrêter notre activité serait un sacrifice certainement inutile car le vide provoqué par notre disparition n’en serait que vite comblé par un autre compétiteur. C’est d’ailleurs la même course entre nations qui les empêche de prendre des décisions d’importance. Le changement doit venir de l’ensemble de la société. Autrement dit, de tous ces acteurs anonymes que sont les consommateurs, nos voyageurs qui, une fois atteint un seuil critique, feront basculer les pratiques de notre industrie. C’est à ce niveau que nous devons contribuer. Ne pas le faire n’empêchera pas le changement et cela reviendra à rester du mauvais côté de l’histoire.

Côté agences, il faudra rendre nos pratiques plus vertueuses, mais avec sincérité. Pas de greenwashing, on n’en est plus à ce stade. Cela va de gestes plus respectueux de l’environnement au bureau à la conscientisation active de nos clients (une charte ne suffira pas), de nos fournisseurs et en interne. Former nos guides à prendre conscience des conséquences de leurs décisions lors du voyage est une étape importante pour qu’ils « déteignent » sur les clients. Faire un choix éclairé de nos fournisseurs au moment de dessiner un programme. C’est préférer un hôtel certifié (aussi critiquables soient certains labels) ou engagé dans une démarche vertueuse à un charmant hôtel indifférent à la communauté locale et aux pratiques écologiques. Une évidence pourtant peu encore pratiquée. Certes, nous avons tous des clients réticents, avec des choix critiquables en ce sens, mais nous pourrons opter pour abonder dans son sens, tenter de l’influencer avec des arguments bien acquis par nos agents de voyage, ou simplement refuser sa demande.
Il s’agira de pister les sources potentielles de diminution de l’empreinte carbone, remplacer un véhicule polluant par des vélos là et quand cela est possible. Il faudra sans doute renoncer à proposer des services luxueux mais extrêmement polluants et qui n’opèreraient pas si nous ne l’avions proposé (le tour en hélicoptère). Dans une perspective de décroissance, c’est penser plus de sobriété et de « slow travel ».
Insérer des visites de lieux engagés, où l’exemple et le discours auront une chance d’impacter les visiteurs, en plus des sites incontournables, est une bonne manière d’inviter les voyageurs à la réflexion mais aussi d’appuyer ces gens incroyables qui luttent pour nous depuis bien avant que nous ayons pris conscience de ces réalités.

Pour diverses raisons que je ne vais pas exposer ici, je ne parlerai pas de principe de compensation carbone mais de soutien aux initiatives vertueuses. En tant qu’acteurs conscients et responsables de nos actes, nous pourrions dédier une partie de nos bénéfices à des projets correctement sélectionnés et gérés.

Un autre axe de travail est celui des voyages « utiles », des voyages de « conscience » (il n’y a pas là de sous-entendu moral) lors desquels de nombreuses visites de lieux engagés permettraient d’apprendre quelque chose : un éco-village (passez outre la vision des hippies), une ferme en permaculture, des initiatives de préservation d’écosystème,… Tout cela avec un fil rouge qui donnerait un sens global à ce voyage.

Transition ou basculement, du Club Med vert pomme ou des vacances zadistes ?

Si le voyage reste donc une pratique de grande valeur, il devra cependant prendre une autre orientation (brutalement sous le fait de changements drastiques, ou graduellement si l’on considère des dégradations localisées et cumulatives).
Si nous considérons l’impact du pic pétrolier déjà passé, et que l’on conçoit que nous consommons actuellement les dernières réserves, les prix des vols devraient inévitablement augmenter et certainement rapidement. Même si l’augmentation du tourisme mondial semble attester l’inverse à court terme.

Si l’on me demande à quoi ressembleront les voyages de demain, je répondrais qu’ils seront plus lents, plus longs, moins éloignés. Le tourisme local prendra le pas sur le tourisme long courrier. Les clients aisés continueront de voyager mais sans doute pour se réfugier dans des oasis protégées, histoire de se faire plus discrets.
Le principe de communauté rééquilibrera l’individualisme forcené et les acteurs du tourisme apprendront à mieux vivre et travailler ensemble, quand le gâteau s’est amaigri et que la collaboration devient une nécessité de survie. Il s’agit d’un changement de paradigme qui se fera, contraint ou voulu.

En somme, décroître ce n’est pas retourner à l’âge de pierre (même si sur certains aspects cela y ressemble) mais vivre mieux (et voyager mieux) avec moins (en privilégiant l’humain et la nature sur le matériel) dans une société devenue plus dangereuse et chaotique. Reconsidérons le voyage ayant du sens dans cette période d’incertitude croissante, libérons notre ingéniosité et employons ce désir de liberté qui caractérise notre milieu de réceptifs pour inventer le voyage de demain. Au pire, si l’effondrement n’a pas lieu, vous aurez donné plus de valeur à vos voyages et contribué à freiner le changement climatique ; au mieux, vous vous serez préparés (avant tout dans vos têtes) à ce qu’il adviendra. Une seule recommandation : ne tardez pas à y réfléchir, c’est certainement la décision la plus conséquente de et sur votre vie et celle de vos enfants.

…Fabrice me disait à propos de cet article que je devrais le colorer, y mettre une touche encore plus personnelle et le relier à l’actualité avec mon analyse particulière…
J’ai longtemps hésité et plutôt que de l’amender, eh bien je vais lui rajouter une extension, une note de fin d’article, un cheveu dans la soupe pour le rendre plus ésotérique…

Avez-vous déjà senti la vie parcourir les racines, le tronc, les branches d’un arbre ? Certains peut-être, mais la plupart n’y voyez qu’un arbre, un objet, au mieux esthétique, sans doute utile. Vous connaissez tous le film Avatar, et ces lumières qui constituent un réseau de veines s’étendant dans le végétal et au-delà, mettant en lien ainsi plusieurs arbres ? Vous avez peut-être même lu ces livres faisant état d’ultimes recherches portant sur les moyens de communication des plantes ?
Imaginez alors qu’il existe un moyen de percevoir cette circulation du vivant ! dont la science officielle se rapproche petit à petit pour en donner des explications rationnelles.

C’est lors de nombreuses cérémonies partagées avec plusieurs communautés amazoniennes que j’ai côtoyées pendant 12 ans que j’ai connu ce type de perception. Il s’agit d’un mode ancien d’accès à la connaissance, dont les techniques varient selon les cultures, mais omniprésentes à travers le monde.
Autant vous dire qu’avec ce type d’expériences, se développe non seulement une manière complémentaire de voir le monde (on le voit en vérité depuis plusieurs angles de vue), en marge de la société dominante, mais aussi une meilleure intuition et surtout une plus grande sensibilité pour le vivant. Des larmes ont coulé sur mes joues à l’annonce des incendies récents en Amazonie qui ont ravagé ces millions d’arbres (en l’écrivant, cette même émotion me revient)… car, tout comme les Indiens, je sais combien tout ceci est un suicide collectif perpétré par une société immature, mais dont le danger réside dans le fait qu’elle s’imagine adulte. Je dois beaucoup à ces populations indiennes dont on fait l’économie dans notre engouement pour une croissance dévorante et inhumaine. Je leur dois ma forme de spiritualité, ma façon si peu consensuelle et commune de voir le monde et de me relationner, et surtout mon respect pour la vie sous toutes ses formes, même s’il me reste bien du chantier comme tout être humain.

Cette intuition, combinée à ma formation d’ingénieur qui m’a permis de ne pas sombrer dans une approche new-age, me font percevoir les récents évènements sociaux, en Équateur, puis au Chili, en Bolivie, ou encore en France, comme les prémisses de l’explosion d’un modèle de société tentant de résister avant que l’océan ne l’emporte, indifférent aux « plus riches » du cimetière en construction autant qu’aux « pauvres ».

Mais c’est grâce à cette spiritualité amazonienne millénaire que je peux garder un certain optimisme réaliste face à l’annonce de l’effondrement des écosystèmes, du réchauffement climatique dont l’issue semble inéluctable ou de la chute du château de cartes financier. Et c’est ainsi que ma spiritualité me dicte de tenter d’alerter aussi mon entourage, par amour, même s’il m’en coûte leur amitié.
Rappelez-vous « Dune »… le dormeur doit se réveiller…

Du greenwashing à l’ère de la défiance : ça va chauffer !

Par François Piot, 46 ans, Président de Prêt à Partir depuis 1998.

Ingénieur de l’École Centrale de Paris, DEA de biophysique moléculaire et d’un DESS de gestion des entreprises (IAE Paris). Entre dans l’entreprise familiale après une brève carrière de chercheur au CNRS (2 ans) et une coopération en Autriche à vendre des ventilateurs.


Il y a 12 ans, j’ai fait la rencontre de Daniel Masson, président de Niger ma Zaada, ONG qu’il avait fondé quelques années auparavant. Daniel m’a expliqué ce que son association réalisait au Niger. Dans un rayon d’action limité, à environ 45 minutes de Niamey, Niger ma Zaada avait construit des puits, des écoles, un centre de soins. Daniel partait plusieurs fois par an au Niger, sur ses deniers et en bénévole, pour suivre les chantiers financés par les fonds de l’association. Il m’a paru sympathique, compétent, et exemplaire, je lui ai signé un chèque de 3 000 €. Et n’ai pas oublié de demander mon reçu fiscal.
Douze ans plus tard, nos dons cumulés se chiffrent à 500 000 €. Par l’intermédiaire de Niger ma Zaada, nous avons financé des puits, des écoles, un centre de soins, un grenier, et un programme de conservation des dernières girafes d’Afrique de l’Ouest, pour lesquelles nous avons replanté quelques 60 000 arbres. Chaque année, nous donnons un peu plus à l’association. Nous avons écrit ensemble une belle histoire, qui s’est enrichie années après années. Cinq personnes de notre entreprise, dont moi-même, sont allées au Niger, encadrées par l’association. Daniel Masson intervient régulièrement auprès de nos équipes de ventes, et nous associons nos clients aux actions menées sur place. Nous les informons, nous les sensibilisons, et nous les remercions, car c’est grâce à eux que nous pouvons «faire notre part» au Niger.

Daniel m’a confié qu’il avait visité, en Afrique, des zones replantées de millions d’arbres… sur le papier. Dans les faits, malgré les panneaux arborant le nom des généreux mécènes, autour, c’est resté le désert. Les sponsors ont-ils réellement payé leur part ? L’argent s’est-il évaporé ? Ce qu’il y a de certain, c’est que le reçu fiscal a bien été utilisé !
Le 30 septembre dernier, Air France annonçait vouloir replanter 70 millions d’arbres pour compenser les émissions de CO2 de ses vols intérieurs. L’information est tombée juste après la faillite d’Aigle Azur et de XL Airways, et surtout après plusieurs mois de « flygskam », la honte de prendre l’avion. Il suffit de lire les commentaires sur le web pour comprendre que l’effet n’est pas celui escompté. Il y a 10 ans, Air France aurait reçu le prix Nobel du développement durable, comme Al Gore a reçu celui de la paix avec des données falsifiées. Aujourd’hui, le citoyen est mieux informé que formé, et il ne croit plus ce qu’on lui raconte. Le scepticisme radical, la chasse aux sorcières du greenwashing, l’ivresse de la théorie du complot, bienvenue dans l’ère de la défiance !

La faillite de Thomas Cook va changer durablement la relation entre le voyageur et son agence de voyages. Cela faisait 178 ans que Thomas Cook vous faisait découvrir le monde. Et, soudainement, tout s’arrête. Il faut repayer les hôteliers, rapatrier les clients, rembourser les acomptes. My God, que fait Scotland Yard ? Dieu sauve la Reine, et mes vacances… Alors, de grâce, ne venez pas me raconter que mon voyage en avion réchauffe la planète et que je ferai mieux de prendre le train électrique ou de partir en covoiturage. 

Nombreuses et louables ont été les initiatives dans notre métier pour proposer des voyages plus écolos : du label Chouette Nature de Cap France au Framissima Nature de Soustons, en passant par le tourisme « nature » d’Austro Pauli ou de Voyager Autrement. Malheureusement, nos clients ne se sont pas rués sur ces voyages qui n’ont jamais trouvé de rentabilité… durable. Quand j’ai rejoint l’entreprise familiale il y a 20 ans, nos clients partaient principalement en vacances autour de la Méditerranée, pendant deux semaines estivales en hôtel-club. Intuitivement, j’ai voulu rajouter à notre catalogue deux superbes circuits : l’un en Bourgogne autour des églises romanes, l’autre au nord de Paris pour visiter les premières églises gothiques. Inutile de vous dire que nous avons annulé les deux voyages.

13 ans plus tard, j’ai récidivé en déposant la marque « Esprit et Culture » pour organiser des voyages avec le diocèse de Nancy. A l’occasion du lancement de cette très belle croisière avec des excursions exceptionnelles, nous avions organisé une fabuleuse conférence avec le journaliste et écrivain, spécialiste des religions, Antoine Sfeir – paix à son âme. Nous avons réuni plus de 2000 personnes en une soirée mémorable, et… vendu 2 cabines sur le bateau. Au début de notre partenariat avec Niger ma Zaada, nos vendeurs avaient pour consigne de demander 3 euros par voyage à nos clients, et de leur expliquer nos actions au Niger. Devant les réactions parfois décevantes, parfois agressives de nos clients, nous avons simplement augmenté nos frais de dossier de 3 euros et  glissé une carte de remerciement dans nos carnets de voyages. Culpabiliser les clients ne sert à rien, sinon à leur donner envie de changer d’agence de voyages.

Quand Fabrice Pawlak m’a proposé de rédiger un article pour le Yakafokon, nous venions d’avoir une discussion sur le voyage éthique et la dimension sociétale des voyages à proposer à nos clients. Et nous n’étions pas du tout d’accord. Nous ne changerons pas les goûts de nos clients, et notre métier est de leur conseiller le voyage qui leur apportera le plus de joies et de souvenirs. Nous avons certes une responsabilité dans les conseils que nous leur prodiguons, y compris en matière de responsabilité sociétale et environnementale. Par exemple, nous luttons contre le tourisme sexuel. Mais si notre client veut lézarder deux semaines au bord de la piscine en évitant tout contact avec les indigènes ou aller passer un week-end à Pékin, nous lui vendrons quand même. 

En revanche, avec un bout de la marge de ces voyages, nous pouvons agir. C’est ce que nous faisons, par exemple en finançant Niger ma Zaada. Nous consacrons une part importante de nos résultats à des investissements dans les énergies renouvelables (panneaux solaires, centrales hydro-électriques, centrales de méthanisation). Comme le colibri, nous faisons notre part. Pour changer les mentalités, pour changer les habitudes, il faudra la force de la loi. Restreindre, interdire, taxer. 

Cela suffira-t-il pour stopper le réchauffement climatique à un niveau acceptable ? Soit la corrélation entre le taux de CO2 dans l’atmosphère et la température moyenne de la planète est un hasard, ce qui signifierait que l’activité humaine n’a pas d’impact démontré sur le climat, soit il est déjà trop tard pour éviter un réchauffement qui devrait atteindre plusieurs degrés et plonger l’humanité dans un chaos inimaginable : montée des eaux, réfugiés climatiques, famines, pandémies, et bien sûr une guerre mondiale, qui mettrait peut-être fin à notre espèce. Restons optimiste pour Gaïa : l’homme est arrivé dans les dernière secondes de la vie sur Terre – 400 000 ans sur 4,5 milliards d’années – et plein d’autres espèces n’attendent que notre disparition pour prendre le pouvoir. Il y aura une Terre pleine de vie après notre disparition. Rappelons que les dinosaures, ces êtres soi-disant mal adaptés et stupides, ont régné sur la planète pendant 160… millions d’années. Dans tous les cas, exit la question du CO2. Évidemment, pas politiquement correct…

En revanche, nos enfants vivront la fin du pétrole. La fin du pétrole comme carburant, car il y en aura toujours, mais on ne l’utilisera plus comme aujourd’hui, tellement son prix aura monté. On l’utilisera tellement peu qu’il redeviendra moins cher qu’aujourd’hui. Souvenez-vous que nos grands-parents ont connu la fin du charbon, grâce au déploiement du nucléaire en France. Le voyage est devenu un besoin essentiel pour beaucoup d’entre nous. La liberté de se déplacer pour pas cher est devenu une liberté fondamentale. Quand j’étais enfant, un voyage en Thaïlande coûtait 20 000 francs (3 000 euros) et durait 3 semaines. Aujourd’hui, personne ne part trois semaines en voyage ! Et l’offre s’est adaptée à la demande : un week-end à Pékin plutôt qu’une vraie découverte de la Chine. Pour un week-end, ne vaudrait-il pas mieux une bonne expérience 3D avec un casque de réalité virtuelle qui, comme le DVD élimine la pub, permettra d’éviter les contrôles dans les aéroports et les files d’attente dans les musées ? Une visite virtuelle de la Cité Interdite, sans bouger de son canapé.

L’autre tendance serait le « slow tourisme » : on court toute l’année métro-boulot-dodo, pourquoi ne pas prendre son temps pendant les vacances ? Il faudra alors repenser nos programmes, passer du temps à visiter tous ces merveilleux sites touristiques secondaires, déserts et authentiques. Partir à la rencontre de celui qui nous accueille dans son pays, découvrir son histoire, sa civilisation, ses mœurs et ses coutumes. Toutes choses que nos touristes stressés et pressés n’ont pas le temps de voir. 

Bien entendu, si on part moins souvent mais plus longtemps, le bilan carbone du voyageur s’améliore, car c’est le vol qui émet le plus de CO2. Il est probable que le chemin sera, une fois de plus, montré par le monde de l’entreprise : de plus en plus de sociétés utilisent la vidéo-conférence pour éviter un rendez-vous de deux heures à l’autre bout du monde. Le voyage le plus économe en CO2 est celui qu’on ne fait pas… Dans les appels d’offres de business travel, on commence à voir apparaître de nouvelles demandes liées à la RSE de l’entreprise. Par exemple, le montant des émissions de CO2 liées au déplacement. C’est une piste intéressante : êtes-vous prêt à payer votre voyage un peu plus cher si votre avion est plus économe en kérosène ? Êtes-vous disposé à prendre le train plutôt que l’avion ? A utiliser Airbnb plutôt qu’un hôtel de chaîne ? Observons bien ce qui se produit dans le monde du voyage d’affaires, cela nous montrera l’évolution du comportement de nos voyageurs.

Si on résume notre plan-climat chez Prêt à Partir pour les 5 ans qui viennent :

  • Renseigner les voyageurs sur leur impact CO2 de la façon la plus précise possible, dès le devis ;
  • Inciter nos clients à partir plus longtemps, mais moins souvent, pour de véritables expériences avec les populations locales ;
  • Consacrer une part toujours croissante de notre marge à des actions utiles et durables qui donnent du sens à notre métier.

On ne va pas sauver le monde, mais on va juste essayer de rendre nos clients, nos fournisseurs et nos collaborateurs un peu plus heureux.

Structurer ses actions à l’aide d’un label de certification durable

Avec Philippe Richard, co-fondateur et directeur des ventes du groupe EASIA Travel, agences réceptives basées au Vietnam, Cambodge, Laos, Birmanie et Thaïlande. 

Propos recueillis et rédigés par Emma Dominguez pour TogeZer le 22/10/2019 


L’origine d’Easia Travel  

De formation d’une grande école commerce, Philippe enchaîne les refus successifs d’embauche professionnelle, aucune grande entreprise du CAC40 n’a voulu de son profil, il n’arrivait pas à passer les tests psychologiques des recrutements. Philippe les remercie vivement aujourd’hui car cela lui a permis de trouver vraiment sa voie. En effet, à cette époque, son envie de vivre à l’étranger le pousse à aller rendre visite à un copain d’enfance vivant au Vietnam, il tombe amoureux du pays et trouve un boulot chez un réceptif local. Sans possibilité d’évolution dans cette entreprise, il côtoie Hoa sa collègue vietnamienne de l’époque, ils s’entendent bien et décident de créer leur propre structure. C’est la naissance d’Easia Travel en 2000, une agence réceptive d’abord présente au Vietnam, puis ils seront rejoints par Huy, l’autre associé vietnamien. Philippe définit Easia Travel comme une société multiculturelle travaillant exclusivement en BtoB.

« Le premier slogan d’Easia Travel, c’était rencontre au bout de l’horizon. Le voyage pour nous, c’est avant tout des rencontres. L’aspect sociétal du voyage avec la découverte d’autres cultures, c’est ce qui nous a motivé dès le départ. On a toujours travaillé sur des circuits proches de la nature et de l’habitant. A l’époque, il fallait d’ailleurs convaincre les agents de voyage que dormir en jonque avec les locaux sur la baie d’Halong était tout à fait sécurisant et combattre l’idée qui circulait qu’il y avait des pirates dans la baie. Côté nature, Huy nous a aidé à développer cette dimension, il a été le premier à faire des voyages en kayak de mer avec National Geographic notamment »

Puis, d’autres ouvertures se font au Laos, Cambodge, Birmanie et Thaïlande, Easia Travel se retrouve alors en plein essor. L’entreprise compte aujourd’hui 400 salariés répartis entre ces 5 pays asiatiques.

La prise de conscience vient de plein fouet, les actions s’ensuivent.

Depuis le début, Easia Travel a toujours travaillé sur l’aspect sociétal du voyage et notamment la rencontre avec les habitants, l’aide en local : « Par exemple, on aide les familles en investissant dans l’amélioration et la restauration de leur habitat pour accueillir les voyageurs, ce qui fait vivre localement beaucoup de monde. Cet aspect sociétal a toujours été naturel et fondamental pour nous. »

Mais le travail sur la dimension environnementale est venu d’une prise de conscience de l’urgence climatique il y a environ cinq ans : « Les vietnamiens n’ont pas conscience du niveau de pollution qui a été atteint. En dehors de la Thaïlande (ndlr pays déjà bien développé), les autres pays n’ont découvert la consommation et le mode de vie occidental que très récemment, et ils mordent dedans à pleine dent – comme nous le faisons, nous occidentaux. »

Voyant que les petites actions ne suffisaient plus, les fondateurs d’Easia Travel décident alors de structurer leur démarche et de l’intégrer dans toutes les actions inhérentes à l’entreprise. C’est pour cela, qu’ils ont souhaité passer au stade de la certification avec le label Travel Life. A l’époque, Philippe fait un comparatif de tous les modèles de certification de la place : Travel Life, ATR, Green Globe, Global Sustainable Tourism Council, Earth Check, United Nations Global Impact, etc.

« Nous avions écarté ATR – le label français – car il ne certifie que la distribution, à la différence de Travel Life qui certifie toute la filière : la distribution, les réceptifs et les hôteliers. En effet, si la boutique est certifiée durable mais que ce n’est pas le cas de tes fournisseurs, la démarche ne va pas jusqu’au bout, pour moi c’est du greenwashing. Ce qui a nous a fait choisir Travel Life, c’est le côté organisationnel, des formations ont lieu régulièrement, il y a un support techno-éducatif qui te permet au fur et à mesure d’avancer dans ton processus de certification. C’est un peu l’équivalent de B CORP, le label américain, même si grosso modo, n’importe quelle société française qui respecte la législation rentre dans les critères B CORP. Il faut savoir que quand tu rentres dans la certification du tourisme durable, ce n’est jamais fini car tu es toujours en évolution, c’est ce qui est le plus intéressant, c’est de se remettre en cause constamment. »

Il y a 5 ans, les fondateurs d’Easia Travel annoncent en interne le processus pour obtenir la certification Travel Life : « ce qui a été génial, c’est de voir à quel point les équipes se sont appropriées ces problématiques, nous n’avons jamais eu à dire, il faut être durable. Nous avons demandé à nos 400 salariés si tout le monde était d’accord et c’était le cas. ». Philippe pense que le succès vient du fait qu’il n’y avait que des initiatives isolées (liées à une demande d’un voyageur plus sensible, liées à un employé qui menait une action par-ci, par-là), ce qui ne faisait pas avancer la problématique au global, il fallait faire un vrai travail de fond.

Pour obtenir leur certification, toute l’entreprise y a travaillé pendant 3 années, une équipe dédiée spéciale durabilité a été constituée pour mettre en place les actions concrètes et les procédures, il a fallu faire un gros de travail pour former les employés. Cela a été contraignant mais très structurant. L’équipe « durabilité » compte aujourd’hui 8 personnes à temps plein sur les 5 pays (Vietnam, Laos, Cambodge, Birmanie et Thaïlande).

Voici quelques exemples d’actions concrètes sur lesquels Travel Life les a aidé à réfléchir et à mettre en place :

–        Le bien-être animal : prenons le cas des éléphants, l’équipe d’Easia Travel s’est rapprochée de spécialistes pour comprendre les problématiques qui sont en réalité assez complexes : « Lors du dernier meeting au Global Sustainable Tourism Council (GSTC) à Chiang Mai, il y a des interrogations qui restent encore en suspens, les spécialistes ne sont pas encore complètement sûrs des impacts du tourisme sur les éléphants. Des TO ont pris des positions extrêmes en bannissant les camps d’éléphants de leurs circuits, mais en réalité ce n’est pas si tranché que cela. On a donc fait un audit de chaque camp et on a arrêté une liste des camps qui nous semble répondre aux derniers critères élaborés par le GSTC mais il n’existe pas de grille de certification, cela fait encore partie des choses mouvantes. »

–        Bannir les bouteilles en plastique : A partir de janvier, il n’y aura plus aucune bouteille en plastique, ni lingette (à utilisation unique) dans les voyages proposés par Easia Travel. Au Cambodge, Easia Travel a rejoint le mouvement Refill Not Landfill. Puis les autres destinations ont suivi. Ces actions impliquent de mettre en place des fontaines à eau sur tous les lieux où les voyageurs passent. Deux années de travail ont été nécessaires avec les prestataires (guides, hôtels, restaurants). « Le plastique est une vraie problématique, chaque jour sur les temples d’Angkor, c’est l’équivalent de 4 piscines olympiques remplies de plastiques consommés (150 000 bouteilles par jour). Le paradoxe, c’est qu’on n’est pas aidé par les autorités locales, ni par les grandes entreprises telles que Coca Cola, le plus grand distributeur de bouteille au monde, qui gagne plus d’argent en vendant des bouteilles en plastique que la boisson elle-même. Et de l’autre côté, des entreprises comme nous, dépensent une énergie folle pour empêcher d’acheter ces produits occidentaux. L’utopie serait que ces grandes entreprises distribuent elles-mêmes ces fontaines pour vendre leurs boissons. Le système est aberrant, et revient au débat sur l’économie circulaire. »

–        La protection des enfants : Easia Travel a rejoint l’organisation Child Safe qui les a aidé à définir des lignes directrices pour s’assurer que leur société prévienne et réponde aux problématiques d’abus des enfants, que les produits ou services de l’entreprise aient le meilleur impact sur les enfants (voyageurs et locaux) dans les écoles, villages, etc.

Le coût des certifications revient souvent dans le débat. Pour Travel Life, il faut compter entre 400 et 2000 euros par an suivant la taille de la société et le pays concerné. Philippe nous précise qu’en réalité : « Le vrai coût, c’est celui l’équipe et des moyens qui sont mises en place. Le fait que tout le monde l’ait accepté aussi chez Easia Travel permet aussi une mise en place plus rapide, et d’un autre côté, l’impact auprès des salariés est important, je pense que les salariés sont plus heureux et plus fiers de travailler chez nous, leur métier prend du sens. »

Chaque année, Easia Travel est soumis à un audit pour renouveler la certification, et l’entreprise doit également auditer ses prestataires. Évidemment, ce processus crée également un impact sur comment construire les programmes : limiter l’avion, proposer des modes de transport plus alternatifs, privilégier les restaurants ayant une approche bio et durable, éviter le gaspillage des repas. Philippe conclut par : « Le stade de la certification, c’est sans fin, ce n’est en fait que le début du travail, il faut toujours s’adapter aux conditions qui changent, s’améliorer, trouver de nouvelles idées, c’est un réel engagement. »

La (R)évolution est en marche…

Philippe observe que le mouvement est général même si cela dépend de la sensibilité des agences de voyage, TO et des voyageurs : « Quand Easia Travel lance le mouvement pour remplacer les bouteilles en plastique par des gourdes, l’entreprise constate que les voyageurs sont fiers de revenir ensuite dans leur pays avec ce produit. Le plus dur finalement, c’est de changer les habitudes dans la vie quotidienne, Alors que quand tu es vacances, tu es déconnecté, si on t’apporte la solution, tu vas te l’approprier le temps de tes vacances car tu auras le temps d’en prendre conscience. Même si c’est une goutte d’eau. »

Le tourisme durable lui fait beaucoup penser à la filière d’agriculture biologique il y a 15 ans. De par son environnement familial, Philippe a baigné dans ce milieu : « Quand on parlait de l’agriculture biologique, les gens étaient réticents comme si l’on parlait d’une secte car cela remettait en cause 50 ans d’habitude alimentaire, de mode de vie. Le bio, c’est revenir à des techniques plus anciennes, moins productives et surtout moins rentables pour des grosses entreprises qui structurent la filière avec une agriculture très intensive. Mais aujourd’hui, l’agriculture bio n’est plus remise en question, la vraie question qui se pose : c’est comment faire en sorte de la rendre accessible à tout le monde ? La problématique a donc complètement changé. Pour le tourisme durable, c’est la même chose, j’espère juste que la transition sera plus rapide. »

Concernant l’avenir du voyage, Philippe distingue deux types de voyage. D’un côté, il différencie le voyage d’affaire : « il faut repenser ce type de voyage, ce sont beaucoup de trajets courts en avion souvent pour des réunions clients très courtes alors que l’impact sur l’environnement est énorme. Envisager une autre façon de rencontrer ces clients, changer notre mode de fonctionnement pour limiter les déplacements professionnels tout en gardant une certaine efficacité et proximité avec les clients, c’est le défi de demain de ce type de tourisme. ». Et de l’autre côté, Philippe précise que pour le voyage loisir : « il faudra sans doute changer nos habitudes de prendre un vol long courrier une fois par an pour aller en vacances, il y aura un certain niveau de décroissance, c’est sûr. En accumulant les voyages en permanence, on rentre dans la consommation, cela n’a plus de sens, il n’y a plus ce côté découverte, ce qui va changer la manière de travailler des réceptifs, il faudra s’y adapter. ».

Ce qui lui parait positif, c’est que toute l’industrie commence à s’émouvoir de la problématique du tourisme durable, c’est en effet un bon moyen d’avancer vite si toute la chaîne du voyage s’empare du sujet : agences de voyage, tours opérateurs, réceptifs, hôteliers, guides, restaurateurs et voyageurs.

2055 Zululand

Par William ISEBE,  co-fondateur de Zuzulu Travel, réceptif USA & Canada

Après avoir exercé pendant plus de 10 ans en tant que chef de produit dans le milieu du voyage d’Aventure pour Atalante et Aventure & Volcans, il se joint à Maya D. Sise en 2017 pour positionner Zuzulu Travel sur le marché des réceptifs francophones nord-américains. Ensemble, ils facilitent les échanges entre leurs trois nations que sont la France, le Canada et les USA, et proposent du voyage thématique en autotour pour petits groupes .


Nous sommes en 2055. Depuis une bonne trentaine d’années, le monde occidental a tourné la page du scepticisme et la notion de « Monde fini » a conquis la conscience populaire. Chacun y va de sa propre expérience. Beaucoup ont été victimes d’évènements climatiques « inhabituels », devenus habituels. D’autres ont un membre de leur famille qui a dû cesser son métier d’apiculteur, faute d’apis mellifera.

D’autres encore ont connu autour d’eux des décès prématurés en raison de l’exposition à telle ou telle substance, sans que l’origine de ces maladies ne déclenche de débat substantiel. La « chasse aux sorciers » du début des années 50 touche à sa fin et les principaux responsables de ces gigantesques scandales sanitaires ont déjà été condamnés. Peu à peu, une grande majorité de la population s’est appropriée le fait que, derrière l’urgence environnementale, se cachent des enjeux sociaux qui nous concernent tous, et même à court terme.

Plus un projet de développement ne se réalise sans que soit étudié avec la plus grande précision son impact environnemental, et sans que l’on ne se demande si l’omelette mérite vraiment de casser des œufs aussi précieux. En France, depuis Notre Dame des Landes que l’on considère symboliquement comme la première victoire majeure du lobbying environnemental sur l’industrie du transport, le trafic aérien a fortement baissé. D’abord, parce que le flygskam a touché une part devenue non négligeable de la population et gagné les couches sociales qui voyageaient le plus. Puis, parce que, le sujet ayant migré vers le cœur des stratégies politiques, les premières mesures restrictives sont enfin tombées.

Le voyage survit bien sûr à ce grand chamboulement.

Il a profondément évolué mais il survit. La transition ne pouvait s’opérer avec une industrie du tourisme devenue incontrôlable lorsque les vols charters et low cost ont rendu moins onéreux pour une famille de faire 4h de vol pour passer une semaine en hôtel-club au soleil, que de prendre sa voiture et traverser la France pour passer une semaine dans un bungalow en camping. Mais la transition ne pouvait pas s’opérer sans le voyage et ce qu’il permettait en terme de prise de conscience, de partage, et d’universalisation des solutions. Alors il a survécu.

Nous tous, voyageurs et voyagistes, nous avons cependant vécu une angoissante période d’aporie. Tous, nous nous sommes demandés comment. Comment voyager sans contribuer à la destruction de l’objet même de la grande majorité de nos voyages, à savoir la Nature ? Nous avons pris conscience que nous ne valons pas mieux que ce chasseur qui venait d’abattre un éléphant en prétextant que le permis qu’il avait payé pour cela contribuerait à la sauvegarde de l’espèce. Rapidement, le mirage d’une suffisante « compensation carbone » s’est volatilisé avec celui du miracle technologique qui devait permettre de relier Paris à New York en 2h sans impact. 

Réduire s’est imposé comme la seule solution efficace. Quelques précurseurs l’ont rapidement compris, comme ce petit groupe de voyagistes du réseau Togezer qui, avec le succès qu’on lui connaît aujourd’hui, a habilement fait évoluer l’offre de ses membres agences réceptives en partant d’un constat très simple :  » Voyager c’est comme manger de la viande, la solution passe par moins et mieux ! « . Le chaland flexitarien devenu mainstream s’est rué dans ces nouvelles « voyageries » et le marché a progressivement imposé sa loi. 

Tous, nous avons dû réapprendre notre métier pour répondre aux nouveaux besoins des voyageurs. Apprendre à écouter des clients qui ont brisé leur bulle numérique pour y préférer le conseil humain. Apprendre à répondre à des voyageurs qui ne parlent plus de destinations et d’incontournables, mais de leur ville de départ et du sens de leur voyage. Apprendre à les aider à maîtriser leur impact en choisissant les bons fournisseurs. Apprendre à les informer avec précision et sans filtre sur les retombées sociales et environnementales de leurs projets. Et surtout, nous avons dû réapprendre à surprendre et oublier ces voyages « hors sentiers battus » dupliqués à l’identique par milliers, 4 étoiles tripadvisor, aseptisés, et ne réservant pour seule surprise que la différence de perspective entre les photos consultées en ligne et la vision directe.

Ainsi, nous avons appris à voyager moins loin ou moins souvent, plus lentement et plus sereinement, en prêtant une attention particulière au sens de nos découvertes. Bien au-delà des enjeux environnementaux, cette métamorphose du voyage eut d’immenses vertus, comme celle de redonner au voyage lointain la saveur particulière du dépaysement et de l’exploration, et de rendre à notre Terre sa dimension magistrale aux yeux des voyageurs boulimiques que nous étions, et qui lui manquaient cruellement de respect.

Pique-nique au coucher du soleil, USA

Que l’on soit bien d’accord, nous sommes en 2019 et ce scénario est de très loin le meilleur que nous puissions écrire sans tomber dans le surnaturel. Nombreux sont ceux qui le jugeront irréaliste. Mais je tenais à ne pas écrire une dystopie de plus sur ce sujet. Si la seule issue possible est cataclysmique, autant que nous mangions tranquillement le pain blanc qu’il nous reste, sans nous soucier de l’avenir. Or, je pense que nous pouvons encore faire le choix de nous saisir du sujet, et de faire ce que nous pouvons faire pour que la transition soit la plus douce possible. 

Qu’est ce que cela signifie à notre échelle de réceptif aujourd’hui? 

Nous sommes une équipe de cinq personnes et je souhaite vivement que la réponse soit collective. Nous n’avons jamais pris le temps, dans notre jeune existence, d’aborder ce sujet en équipe mais nous avons prévu d’en faire l’un des thèmes centraux de notre prochaine réunion, programmée en décembre. Personnellement, j’y avancerai quelques pistes de réflexion, que je m’efforce d’appliquer de plus en plus fréquemment comme promouvoir les initiatives locales qui permettent de voyager en limitant son impact, sanctionner a contrario les prestations les plus néfastes, informer les voyageurs en toute transparence sur l’impact de leur projet en utilisant les outils d’évaluation à notre disposition aujourd’hui… mais j’espère que l’intelligence collective nous permettra de formuler une réponse bien plus ambitieuse !

Mobile home office : cadres le jour, campeurs le soir

Par Hélène Michel, Grenoble École de Management (GEM) and Dominique Kreziak, Université Savoie Mont Blanc

Le drapeau noir flotte chez Loïc, cadre la journée et campeur le soir. Hélène Michel/DR

Ils sont managers, chercheurs ou consultants. Ils ont un « vrai » logement avec tout le « confort moderne ». Et pourtant, ils décident de s’en détacher pendant un moment et s’installent, pour un à six mois, dans un camping à quelques kilomètres de chez eux. Le matin, ils se lèvent pour aller au bureau et le soir ils déconnectent en rentrant dans leur mobile home, leur caravane ou leur tente. Ils ne veulent pas être considérés comme touristes. Ils vivent, pendant un moment, à la frontière du système.

À quoi correspond cette nouvelle pratique de quête de frugalité, quelles en sont les étapes et les rituels ? Petite approche sociologique du camping comme lieu d’évasion professionnelle…

Etape 1 : De la solution de secours à la micro-aventure

Tout commence souvent par un incident, un dérapage dans un système bien huilé. Le recours au camping s’annonce alors comme solution de secours.

Loïc, en couple, quinquagénaire et père de 3 enfants (maintenant adultes), installe sa caravane devant le lac, d’avril à fin septembre depuis… 15 ans. Il est cadre dans une société d’informatique :

« Il y a 15 ans, je vivais à 60 km de là. Je faisais les aller-retour tous les jours pour venir travailler. Cet été-là, mes parents ont annoncé qu’ils venaient passer 15 jours avec nous. Moi je travaillais. Et dans l’appartement, l’été, au chaud, si nombreux, c’était pas envisageable. Alors on a découvert ce camping, à côté de mon boulot. Et on y est venus tous ensemble. »

Cette solution de secours se présente parfois comme une forme de micro-aventure, une tendance touristique émergente.

Lorsque l’envie de partir à l’aventure autour du monde est contrariée par des impératifs de temps, de budget ou de contraintes personnelles ou professionnelles, la micro-aventure suggère des alternatives courtes, locales, peu coûteuses, low-tech et dans le même esprit. Il s’agit, par exemple, de nuit en bivouac en semaine ou de nage en rivière, le tout conciliable avec horaires de bureau et vie de famille.

Elle s’applique en zone rurale tout comme milieu urbain en proposant, par exemple, de descendre la Seine en paddle. L’entreprise Red Bull, intéressée par les pratiques sportives extrêmes ou alternatives, se penche également sur le sujet.

C’est une « petite aventure faisable, pour des gens normaux avec une vraie vie », comme le dit Alastair Humphreys, son promoteur. L’Ici est réenchanté.

Puis le rythme s’installe et l’aventure grandit… Pour Loïc, le cadre campeur :

« La première année, c’était trois semaines, dans une tente. La deuxième année, cinq semaines. La troisième année, on a changé de coin, dans le camping, pour un meilleur emplacement. On s’est mis plus près du lac. Toujours avec la tente. Sous un arbre. Le chat était ravi. Il pouvait y grimper. La quatrième année, on a pris une caravane et on s’est installé pour la saison, c’est-à-dire six mois. Et on a fait cela tous les ans pendant 11 ans. On a déménagé notre véritable logement à 10 km du camping, mais on a continué à venir y passer six mois par an. »

Etape 2 : L’élaboration d’un mode de vie avec ses rituels

C’est une forme de migration d’agrément : on décide de vivre sur un lieu en fonction de ses loisirs, en organisant son travail à partir de là. Habiter à l’année, voire toute l’année dans une ambiance de vacances attire ainsi de nombreux nouveaux habitants dans des espaces privilégiés où s’hybrident les espaces de vie et les espaces récréatifs.

Ici, la migration d’agrément est temporaire et saisonnière. Elle s’accompagne d’une rupture avec le mode de vie du reste de l’année, tout en maintenant le rythme professionnel. Il s’agit d’un ailleurs de proximité qui peut permettre de tester un mode de vie alternatif.

Les caractéristiques de cette migration sont :

La déconnexion : La première chose recherchée est une rupture avec un mode de vie jugé rapide et ultra connecté. Au camping, on ralentit. Pour Loïc :

« Quand on est ici, on n’a pas de télé, pas d’écran. On écoute un peu la radio le matin. On joue. Et c’est le seul moment de l’année où je lis. Cela apporte de la sérénité, du calme. On déstresse. »

L’ensauvagement : La présence d’un élément naturel fort, tel que la mer, la montagne, le lac joue un rôle clé dans cette déconnexion. À la fois comme potentiel d’activités (randonnée, baignade, etc.) mais aussi pour la puissance du paysage et le contact direct avec les éléments :

« À quoi on voit que je vis différemment ? Au bronzage. On me dit : vous étiez en vacances ? Non. Je vis en extérieur. »

Et la météo fait aussi partie de l’aventure :

« Il faut qu’il neige pour qu’on rentre dormir chez nous… et encore ! Une année, le 1er mai, il a neigé 15 cm au bord de l’eau. On n’a pas bougé. Une autre année, l’eau du lac est montée. On a été inondé. On a déplacé la caravane… mais on est resté ! »

La frugalité : En changeant d’habitat, on change de conditions de vie. Dans le cas du camping, il s’agit, explique Loïc, de limiter les aspects matériels et vivre plus frugalement :

« Vivre dans 12m2, c’est aller à l’essentiel. Tout est resserré. Tu es obligé de limiter. Être minimaliste. Choisir ce que tu emmènes : tes vêtements, tes livres. En même temps la baignoire est grande (en montrant le lac). »

Des vacances par porosité : Vivre sur un lieu de loisirs ou de villégiature, lorsque l’on travaille, semble diffuser, par porosité, une ambiance positive. Pour Loïc :

« Tous les gens qui sont là sont en vacances. Donc on est en vacances. Il y a une ambiance conviviale, le soir on s’invite pour l’apéro sur de grandes tablées. Mais moi, je travaille. Je ne peux pas faire cela tous les soirs. Donc j’explique que je garde cela pour les week-ends. Le soir, je pars en paddle, je me baigne. Mais pas tous les jours. »

La notion de workation se développe également selon ce principe d’hybridation des temps et lieux de travail et de vacances, en permettant aux nomades digitaux de se retrouver en mode coworking dans des lieux de vacances.

Le déplacement du centre de gravité : Plus de connexion, peu de tâches ménagères… Les priorités sont redéfinies. Le temps s’étire :

« Une fois qu’on est installé ici, on a tendance à faire moins de choses. On a du mal à sortir. Il faut se forcer. On n’a plus envie. On se coupe un peu du monde. »

Etape 3 : flirter avec la frontière du système ?

Être dans l’entre-deux…

Cette pratique d’ensauvagement brouille les frontières entre travail et loisirs, quotidien et vacances. Cet entre-deux renvoie à la liminalité, le seuil, la suspension entre deux états où les règles sociales courantes n’ont plus cours et où la socialité se recompose en créant des « communautas » temporaires et fortes.

Des relations intenses inattendues se nouent puis meurent avec le retour à la vie normale. Pour Loïc :

« Je suis dans un milieu de cadres. Ils ne comprennent pas. Le camping, cela a une image de beauf. On passe pour des doux dingues… jusqu’à ce qu’ils viennent. Et là ils comprennent. »

… Ou sauter le pas ?

Au-dessus de sa caravane, Loïc a hissé un drapeau pirate avec une tête de mort :

« C’était mon cadeau de fête des pères. À ce moment-là, tout le monde avait des drapeaux dans le camping, de son pays. Il y avait une coupe de foot. Cela m’a énervé. J’ai hissé le drapeau pirate. La piraterie, c’est un « modèle » de vie. Égalitaire, auto-géré, libre. Mais il y a des gens qui n’ont pas aimé au camping. Ils ont eu peur, se sont plaint. Alors que cela n’est pas le but. Le principe de la tête de mort, c’est se rappeler qu’on peut mourir à tout moment. Il faut vivre. Bien, et maintenant. C’est une idéologie. »

Pour lui, cet entre-deux est un prélude à un changement de vie plus radical :

« Cela pourrait être mon mode de vie tout le temps. La suite ? On envisage une tiny house. Voire de vivre en communauté. »

Mais sauter le pas en vivant et habitant de façon alternative n’est pas chose simple, que cela soit en termes de normes sociales ou réglementaires. Selon Loïc :

« Le système ne veut pas qu’on vive en mode léger. Les mentalités, le PLU, la législation, etc. tout va à l’encontre de cela : tu ne peux installer une “tiny house” que sur une zone non constructible. Tu dois démontrer que tu peux la déplacer tous les trois mois, photos à l’appui. Donc il faut trouver un paysan qui te loue un champ, parce que sur les zones constructibles, tu n’y a pas droit. Bref, le système fait tout pour éviter les comportements alternatifs. Il faut trouver la faille. »

Mais alors, ces cadres campeurs, que font-ils pendant les vacances ? Et là, c’est une forme de mise en abîme. Pour Loïc :

On a une autre caravane, plus petite alors on part en vacances ailleurs, dans un autre camping, vers la mer. C’est drôle, on part du camping et les gens nous disent : Bonnes vacances ! »

Hélène Michel, Professeur – Serious Games & Innovation Management, Grenoble École de Management (GEM) and Dominique Kreziak, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Savoie Mont Blanc

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

La création d’un itinéraire 0 déchet

Par Alexia LAFITAU, co-fondatrice de l’agence réceptive Mexikoo, basée au Mexique et spécialiste des voyages sur-mesure écotouristiques.


Nous sommes fiers de vous présenter ce premier itinéraire zéro déchet dans la région la plus visitée du Mexique, la péninsule du Yucatán. Depuis la création de Mexikoo, nous nous efforçons de réduire notre impact et celui de nos voyageurs sur l’environnement. Le Mexique reçoit des milliers et des milliers de visiteurs chaque année, et l’impact sur la biodiversité se fait ressentir. Les coraux sont malades, certaines espèces en voie de disparition, des zones côtières souvent très polluées par les déchets ou encore les eaux noires des hôtels reversées dans la mer.  
C’est pour cela que dès le début, l’idée de Mexikoo a toujours été d’allier le voyage avec respect du pays que l’on visite. Nous avons toujours fait en sorte de sélectionner nos partenaires en fonction de leurs initiatives écotouristiques. Par exemple, nous avons quelques partenaires qui travaillent avec des communautés locales, d’autres qui proposent de la crème solaire bio pendant les tours etc. Concernant l’offre hôtelière, nous avons toujours fait en sorte de sélectionner de petites structures à faible impact, en général des hôtels de moins de 20 chambres, avec des initiatives écologiques tangibles telles que l’utilisation de panneaux solaires, de produits biodégradables, recyclage des eaux usées, etc.  

Cette année, nous avons eu envie d’aller plus loin, en proposant un itinéraire “zéro déchet”. La première cible de cet itinéraire est le plastique, qui est le fléau de nos océans. En effet, plus de 60% des produits jetables en plastique termine malheureusement en mer, et affecte la vie marine. Nous l’avons donc totalement éliminé de ce circuit et  fournissons une gourde en inox à nos clients dès leur arrivée au Mexique pour s’hydrater pendant le voyage. Les hébergements et excursions de cet itinéraire proposent des fontaines d’eau potable pour que les personnes disposant d’une gourde puisse la remplir pendant leur voyage. Cela permet d’éviter d’acheter des bouteilles en plastique.  

En plus d’offrir une gourde en inox, nous offrons un sac de bienvenue en tissu aux voyageurs, contenant des produits de voyage bios comme de la crème solaire et de l’anti-moustique biodégradable, ainsi qu’une paille en inox pour siroter leurs petits cocktails.  

Pour l’ensemble de l’itinéraire, nous avons méticuleusement sélectionné chacun de nos partenaires, en fonction de leurs actions écologiques, et n’avons gardé que les plus verts. Les hôtels ont tout particulièrement fait l’objet d’une sélection selon un cahier des charges que nous avons personnellement conçu. Chacun d’entre eux s’est finalement vu attribuer une note écologique, suivant des critères tels que l’utilisation de savons bios, le traitement des produits toxiques, le traitement des eaux usées, l’utilisation de l’énergie solaire, etc. Nous avons décidé d’attribuer une note aux hôtels pour valoriser les établissements qui proposent des actions tangibles pour la protection de l’environnement. C’est très important pour nous de les mettre en avant auprès des voyageurs, car cela demande beaucoup d’efforts d’être éco-responsable.  

D’ailleurs, il a été compliqué de trouver des hôtels qui ne proposent pas de bouteilles/produits en plastique dans les chambres. C’est pourquoi notre itinéraire zéro déchet ne passe pas par la ville de Campeche. Nous avons appelé tous les hôtels de la ville, et aucun n’était prêt à les retirer des chambres. Pour aller plus loin, et convaincre plus d’établissement de rejoindre cet itinéraire, nous avons pour objectif d’envoyer des communiqués aux hôtels afin de leur donner les solutions. En effet, nous nous sommes rendues compte que si nous souhaitons convaincre, nous devons proposer les solutions, et calculer les investissements de ces changements pour les hôtels.  

Les excursions quant à elles sont toutes à mobilité douce, donc sans moteur, allant du kayak, au paddle, en passant par la voile et le vélo. Il était important pour nous de prouver qu’il est possible de créer de belles expériences de voyage, tout en limitant notre empreinte écologique.  

Nos guides partagent aussi nos valeurs d’écotourisme et de développement durable, et les transmettent au quotidien aux voyageurs. Ils protègent les écosystèmes, respectent les animaux et leur environnement naturel. Nous avons des guides qui s’impliquent beaucoup dans la protection de l’environnement comme José à Celestún qui œuvre pour la reforestation des mangroves, ou encore ramasse les déchets dans la biosphère de manière bénévole chaque semaine. Notre mission est de nous entourer d’acteurs passionnés et impliqués afin de faire évoluer le tourisme au Mexique.  

Caractéristiques de cet itinéraire :

Découvrez toutes les richesses de la péninsule du Yucatán de la plus responsable des manières, lors de cet itinéraire zéro déchet : 

  • Les plages paradisiaques des Caraïbes et du Golfe du Mexique ; 
  • Les plus beaux cénotes (puits d’eau douce dus aux formations géologiques de la région) ;
  • La biodiversité locale (faune, flore, jungle, lagune, etc) ; 
  • Les sites archéologiques variés ; 
  • Les villes et villages typiques du style colonial hispanique ; 
  • Une île paradisiaque, idéale pour vous ressourcer avant le retour.

Caractéristiques de cet itinéraire 0 déchet :  

  • Hôtels les plus verts de chaque destination avec de multiples actions écologiques, parmi lesquelles : utilisation de panneaux solaires, recyclage des eaux usées, protection animale, soutien aux communautés locales, ampoules basse consommation, ou encore usage de matériaux recyclables / biodégradables ; 
  • Aucune bouteille plastique durant le circuit, aussi bien dans les hôtels que lors des excursions ; 
  • Excursions utilisant des moyens de transport sans moteur uniquement ; 
  • Voiture basse consommation, bientôt hybride (aucune offre de véhicule hybride au Yucatán actuellement) ; 
  • Kit de l’éco-voyageur Mexikoo :  
  1. Gourde Inox  
  2. Pailles Inox  
  3. Crème solaire biodégradable  
  4. Anti Moustique biodégradable  

Vous retrouverez toutes les informations de cet itinéraire 0 déchet ​ici​ :

Pour en savoir plus, vous pouvez contacter directement Alexia Lafitau, co-fondatrice Mexikoo : alexia(at)mexikoo.com

#tourisme de masse #authenticité #RSE #population locale

Par Van Thai Nguyen, 34 ans, responsable marketing et produits de l’agence réceptive familiale TTB Travel basée au Vietnam depuis 1996.
vanthai@ttb-tour.com


Dans un article précédent de Togezer sur l’avenir des réceptifs, j’ai déjà souligné que notre rôle s’émancipe de plus en plus. Nous ne sommes plus un simple « logisticien » qui  exécute bêtement les ordres des voyagistes à l’étranger. De nos jours, nous sommes un véritable expert du terrain avec un esprit d’innovation très prononcé. 2012 constitue une autre année charnière pour le Vietnam. C’est à cette date que le tourisme de masse s’est invité chez nous. Il n’a pas fallu longtemps pour mesurer à quel point son « succès » s’accompagnait d’effets négatifs, pour le pays et pour ses habitants. Le tourisme de masse crée le clivage social, ridiculise notre culture et pollue notre patrimoine.

  • Responsabilité sociétale vis-à-vis de nos collaborateurs : La durabilité du tourisme commence d’abord par le respect de la population via une rémunération décente. La raison pour laquelle il y a une pénurie de guides francophones, c’est parce qu’ils sont mal payés, ce qui les forcent à amener les voyageurs vers les boutiques attrape-touristes dans l’espoir de compenser un salaire ridicule. Pour les convaincre de rester dans le métier, nous augmentons le salaire de base de 30% + bonus. Idem pour les chauffeurs. Trop souvent, les gens veulent être éthiques vis-à-vis des populations pauvres dans les régions lointaines. Mais ils ne sont jamais éthiques vis-à-vis des compagnons qui sont les plus proches de leurs voyages : guides francophones et chauffeurs.
  • Responsabilité sociétale vis-à-vis de nos prestataires : le tourisme de masse vient d’une participation active des groupes de promoteurs, à la fois vietnamiens et étrangers. Les grosses chaînes tiennent la suprématie dans le parc hôtelier vietnamien. On sait qu’il y a toujours une fuite de capitaux quand les Accor, Hilton, Marriott s’implantent dans notre pays. Donc, nous éliminons volontairement toutes les marques étrangères dans nos offres. Pas de MGallery, pas de Sofitel, pas de Novotel, chez nous. Tous les hébergements dans nos circuits sont tenus par des Vietnamiens.

En tant que petite structure familiale, nous n’avons pas de ressources financières pour « sponsoriser » des ONG comme font souvent plusieurs agences dans leur communication. Nous apportons plutôt notre expertise et nos connaissances en tourisme durable pour aider nos partenaires. Nous accordons l’importance à deux axes majeurs :

Lutte contre le sur-tourisme

Compte tenu de sa taille trop petite, se battre pour un tourisme responsable dans les grands sites est une bataille perdue d’avance. Au Vietnam, il y a deux fleurons du tourisme vietnamien : la baie d’Halong et Sapa. Victimes de leur succès, les autorités locales visent la quantité plutôt que la qualité. Statistiques embellissent l’image de leur mandat. Résultat : on aime bien accueillir 3 millions de Chinois dans la Baie d’Halong et 2 millions de Chinois à Sapa. On aime bien accueillir 1 million de croisiériste dans la Baie d’Halong. On aime bien la mise en place des parcs d’attraction qui flattent l’exploit technique des téléphériques. Par conséquence, ce sont les constructions massives partout, les bateaux-hôtels qui inondent la baie, les déchets jetés dans la mer, les pêcheurs chassés de leur lieu natal et remplacés par les éco-musées dans âmes. Idem pour Sapa dont l’identité culturelle des ethnies minoritaires est écrasée sans merci par les groupes de promoteur. On sait que 95% des touristes visitent 5% du territoire. Alors, pourquoi pas neutraliser cette tendance ? Voilà pourquoi TTB TRAVEL a fait le choix d’éliminer définitivement la Baie d’Halong et Sapa dans sa production depuis 2014.

Nous essayons de dispatcher les 95% de touristes vers les endroits moins connus mais autant sublimes. Nous décidons de commencer l’éducation environnementale avec des endroits vierges, là où les partenaires locaux sont plus à notre écoute. Il y a en plusieurs dans notre réseau, et souvent ce sont les villages où nous connaissons personnellement des acteurs impliqués : Hai Hau, Hoang Su Phi, Ba Thuoc, Binh Phuc, Vung Liem. Ainsi, nous co-construisons les projets de tourisme communautaire avec un fort accent sur l’empreinte écologique. Nous sensibilisons dès le départ les conséquences néfastes de la consommation plastique et proposons des solutions alternatives. Dans les régions comme Hoang Su Phi et Nam Dinh, nous exigeons de nos prestataires d’utiliser de l’eau préalablement bouillie, au lieu d’acheter des bouteilles plastiques. Les clients qui passent la nuit dans ces endroits peuvent remplir leur gourde, au lieu de gaspiller des bouteilles d’eau. Pour certains endroits comme Hai Hau et Hoang Su Phi, nous leur prodiguons des conseils techniques tels que : comment concevoir un site internet, travailler sur leur positionnement pour renforcer l’identité culturelle du lieu, comment mettre en place un programme de visite qui profite à plusieurs personnes de la communauté, comment mettre en place un processus d’accueil pour renforcer l’hospitalité du propriétaire, etc.

Pour sensibiliser les Vietnamiens à la notion de déchet, nous organisons gratuitement une activité de kayaking à Hoi An pour nos clients. L’idée est de pagayer le long de la rivière Thu Bon pour ramasser des déchets sur les berges, notamment des sacs et bouteilles plastiques. Dans certains circuits au Nord du Vietnam, nous proposons aux clients d’utiliser leur propre gourde et de la remplir avec de l’eau bouillie à chaque étape. En moyenne, un client consomme une bouteille 500ml par jour, et pour un circuit de 15 jours sur place, c’est en gros une trentaine de bouteilles en plastique gaspillées. Avec une gourde, on peut sauver notre planète. A petits pas, nous pouvons réduire considérablement la consommation plastique.

Axe sociétal

Danse Apsara, Cambodge

Enfin concernant l’aspect sociétal, nous encourageons l’entrepreneuriat local et les porteurs de projets communautaires que nous soutenons techniquement et conseillons. Idem avec les prestataires et artisans que l’on aide à mettre au point des produits touristiques non réducteurs, mettant au contraire en valeur notre culture et les traditions locales. Et comme ces produits plaisent aux voyageurs, ces personnes en vivent de mieux en mieux. Par exemple, l’ONG Zo Project vise à préserver le métier de fabrication du papier ancestral. Via l’innovation, nous avons élaboré conjointement avec les membres des produits touristiques tels que : atelier de découverte, atelier de travaux manuels, création d’objets cadeaux dérivés. Tout cela crée du travail complémentaire pour les artisans. Concrètement : nous achetons de nombreux produits chez Zo Project pour offrir à nos clients : lampions, estampes, calendrier, etc.

Nous recommandons aussi Zo Project à nos prestataires (restaurants, hôtels) pour qu’ils achètent leurs produits. Cela génère des prises de commandes stables pour les artisans. Nous soutenons le slogan « les Vietnamiens achètent vietnamien ». En outre, nous intégrons l’atelier de travaux manuels de Zo Project dans certains de nos circuits, notamment pour les voyage en famille. Les enfants adorent ça ! Du coup, la visite en question permet de rémunérer les artisans qui accompagnent les enfants pendant la réalisation des œuvres. La rémunération va directement dans la poche des artisans. Tous ces revenus sont largement supérieurs à la marge qu’ils réalisent sur une estampe traditionnelle vendue. L’honoraire payé pour une séance d’atelier de 2h équivaut à 20 fois la marge sur une estampe traditionnelle (et il faut 2h pour finir le travail de chaque estampe).  Nous multiplions cette démarche pour les autres activités telles que la cueillette de thé dans la région de Thai Nguyen, la fabrication de cerf-volant à Hue, etc.

La forme même de nos voyages, ancrés dans le local, en fait des actes solidaires. L’argent dépensé par le voyageur bénéficie directement à l’habitant local. Nous sommes solidaires et équitables puisque nous varions nos contacts et favorisons ceux qui sont communautaires : famille d’accueil, artisans et fabricants (alcool, sauce de poisson, etc.), tous profitent de ce tourisme villageois.

Réinventer le voyage porteur de sens

Par Alix Gauthier, 34 ans, diplômée de Sciences Po Paris et HEC Entrepreneurs

Après 5 ans de salariat en grand groupe en marketing et communication (Pernod Ricard), j’ai co-fondé Copines de Voyage et Petits trips entre amis, que j’ai quitté cet été. J’accompagne désormais les jeunes entreprises du tourisme dans leurs problématiques de positionnement, organisation et croissance ! Vous pouvez me contacter par mail : gauthieralix@gmail.com


Jamais notre rapport au voyage n’a été autant questionné dans les pays européens. A la rentrée des classes en Septembre cette année, on pouvait entendre beaucoup de parents revendiquer assez fièrement des vacances « 100% made in France ». Émettre un certain scepticisme envers les séjours européens ou longs courriers de 5 à 15 jours, fortement consommateurs en kérosène, en énergie, et en désagréments liés à la surfréquentation touristique des mois de Juillet et Août. Plus particulièrement chez les « CSP+ », ces catégories socio-professionnelles supérieures, dont les moyens financiers en font, à coup sûr, le profil type de clients des réceptifs Togezer.

Et les chiffres de l’été 2019, publiés par le SETO (en octobre 2019), semblent corroborer ces conversations de sortie d’école : la France a connu une croissance des voyageurs de 5,6% (en voyages à forfait), là où le moyen courrier et le long courrier ont déçus (respectivement -4,2% et 0,9%). Bien sûr, les mouvements sociaux français ont eu un impact majeur, mais comment ne pas s’interroger, derrière ces chiffres, sur certains signaux qui apparaissent dans le rapport au voyage des sociétés les plus industrialisées ?

Si certaines tendances de fond pourraient nous laisser craindre un recul du marché de la consommation touristique en chiffre d’affaires, il est plus probable qu’il s’agisse simplement d’une mutation dans notre façon de voyager, par laquelle le voyage devient un événement, plus rare, plus intense, plus riche en terme de sens pour l’individu.

Il y a encore quelques années/mois, la fréquence de vos voyages, l’exotisme de vos destinations, la richesse de vos rencontres locales, étaient unanimement reconnues comme vertueuses. Désormais, l’acte de voyager n’est plus un fait aussi consensuel.  L’acceptation sociale du lourd bilan carbone lié à l’utilisation du transport aérien en est bien sûr une cause directe. Mais d’autres paramètres contribuent à cette modification des perceptions : dans des vies professionnelles soumises au stress, des vies personnelles qui laissent peu de moments de qualité en famille, l’aspiration au « slow travel » semble de plus en plus forte. Et se poser dans un lieu hexagonal, en reconnexion avec la nature et ses proches, un projet qui devient fortement désirable. A l’opposé, donc, des formats traditionnels  de voyages « vacances scolaires », qui nécessitent du temps et de l’organisation en amont et génèrent eux-mêmes du stress et de la fatigue. A fortiori si le voyage implique le passage par des sites ou itinéraires sur-fréquentés, par le cumul de touristes à certaines périodes de l’année, ou l’accélération du tourisme outbound parmi les populations des pays émergents.

Pour autant, je crois assez fortement que ces phénomènes ne constituent pas la mort à petit feu du tourisme moyen et long courrier des français, mais plutôt une mutation en devenir, selon le concept économique Schumpeterien de destruction créatrice. Netflix fait certes trembler Canal +, mais la consommation de contenus vidéos des français n’a jamais été aussi élevée !

Et ceux là même qui revendiquent des vacances 100% françaises formulent aussi, en parallèle, des projets de voyages longs, immersifs, et porteurs de sens.

Pour certains, ce projet sera un congé sabbatique « Tour du monde », en famille, de 6 mois à 1 an, voire plus, pour recréer un lien fort et impérissable au sein de la cellule familiale. L’émission « zone interdite » en a fait sa marque de fabrique, avec 4 à 5 épisodes par an dédiés à ces familles qui changent de vie, partent faire un break pour un tour du monde. Si cette répétition crée une overdose chez certains téléspectateurs, les belles audiences de ces épisodes incitent la chaîne à reprogrammer régulièrement le sujet.

Pour d’autres, ce projet se construit autour du dépassement de soi, physique ou psychologique : une retraite méditative, transformationnelle, une itinérance exigeante en vélo, à pieds, en traversée, chacun à son niveau. Pour un break à un moment de changement de vie, de remise en cause personnelle, suite à un événement personnel ou professionnel. A la manière d’Elisabeth Gilbert dans son récit « mange, prie, aime », ou de ces étudiants ou jeunes actifs qui veulent découvrir le monde lors d’une phase de transition. A l’image de ces quelques 300 participantes qui partent chaque année pour le raid Amazones, des femmes ordinaires, et non pas des sportives de haut niveau, qui sortent de leur confort quotidien, de leurs obligations de maman, pour se confronter pendant 5 jours de raid à des épreuves physiques dans un environnement lointain. Ou bien de « Copines de Voyage », qui permet à certaines femmes de se lancer pour la première fois dans un voyage à l’étranger. Ou encore de ces femmes et ces hommes qui se lancent un défi de dépassement de soi par le biais d’une exploration, avec Explora Project. Ou enfin, de ces passionnés, capables de traverser le monde pour participer à des compétitions ou évènements mythiques, qu’il s’agisse du marathon de New York, du Burning Man festival, ou d’un IronMan (triathlon).

Voyager moins souvent loin, mais dans un cadre plus fortement porteur de sens pour soi. Les projets cités ci dessous ont tous pour dénominateur commun la recherche d’une «expérience mémorable». Comme le rappellent les chercheurs et professeurs Hélène Michel, Dominique Kreziak et Marielle Salvador dans leur article « la microaventure, le voyage en bas de chez soi » : « Une expérience mémorable comprend trois dimensions clés : une dimension personnelle et psychologique liée à l’émotion, une dimension culturelle liée à l’environnement, et une dimension relationnelle. (…) Nous sommes désormais dans une « économie de l’expérience » où les acteurs du tourisme s’organisent pour répondre à cette recherche par l’individu d’un authentique soi (…). »

Les esprits chagrins y verront un rapport plus égoïste au voyage, par lequel on recherche, à l’étranger, un miroir de soi pour y trouver des réponses, une émotion. D’autres se réjouiront que le tourisme moyen ou long courrier retrouve de sa sacralisation, de son exceptionnel, qui marque un point de passage, avec un avant et un après. Et les entrepreneurs y verront une opportunité de réinventer le tourisme de demain, en s’interrogeant sur la façon de réinventer un voyage mémorable pour nos clients !

*étude SETO été 2019, publiée en octobre 2019
** https://start.lesechos.fr/actus/tendances-societe/la-microaventure-le-voyage-en-bas-de-chez-soi-16430.php


S’engager, pas toujours facile mais indispensable !

Par Bianca Von Lieres, namibienne de 47 ans, fondatrice de Matiti Safaris en Namibie.

Diplômée de « Retail Business Management » au Cape Technikon, puis 2 ans guide freelance en Namibie, j’ai fondé le réceptif Matiti Safaris en 1999 avec Gwendal Cochet pour valoriser le patrimoine exceptionnel namibien. Notre réceptif est le spécialiste francophone du voyage sur-mesure en Namibie, l’équipe compte aujourd’hui 60 employés. Contact : bianca@matitisafaris.com


Notre mission est celle de la plupart des réceptifs dans le monde entier : accueillir les voyageurs dans les meilleures conditions possibles et leur faire découvrir les beautés de la Namibie tout en ayant une bonne influence sur les communautés et le pays dans lequel nous vivons.
Cela passe aussi par le bien-être de nos employés, leur formation et leur accompagnement jour après jour. Notre principale clientèle parle français, aussi, nous employons quelques guides étrangers. Néanmoins, notre but principal est d’offrir de nouvelles opportunités aux Namibiens, et leur permettre d’accueillir et guider notre clientèle francophone. Nous offrons une formation complète qui va des techniques de guidage aux cours de français dispensés gratuitement au sein de notre entreprise. C’est un risque certes, car il est arrivé que des guides formés nous quittent à la fin de leur apprentissage, mais nous sommes persuadés que les Namibiens sont les meilleurs ambassadeurs de leur pays, et leur formation est également une garantie pour nos clients et pour notre réputation auprès de nos agents. Aujourd’hui, nous avons parmi nous plusieurs guides namibiens qui parlent couramment français et guident en parfaite autonomie.  

Il ne faut pas oublier notre équipe au bureau : elle a cette même opportunité d’apprendre le français. Tous nos documents de voyage sont en français et sont souvent rédigés par des personnes sans aucune connaissance de la langue française (cela demande une vérification rapide par une personne qui connaît la langue). Pour faire gagner du temps, nous encourageons les consultants à participer aux cours de français proposés gratuitement dans nos locaux, en partie pendant les heures de travail (sur un cours de 1h30, une heure se déroule pendant les heures de travail, et 30 minutes pendant leur pause déjeuner). Environ 50% de nos consultants ont déjà une très bonne notion du français et peuvent le lire (le parler est un peu plus difficile).
20 ans après sa création, Matiti Safaris compte aujourd’hui plus de 60 employés dont la grande majorité est namibienne. Avoir un emploi c’est subvenir à ses besoins, ceux de sa famille mais aussi avoir accès à de nouvelles opportunités au sein de son entreprise. Nous sommes donc fiers de pouvoir rallier nos employés à nos valeurs et faire en sorte ensemble que notre empreinte en Namibie soit la plus vertueuse possible.
Nous nous engageons depuis le début dans des projets solidaires. Nous croyons en effet en un tourisme durable et bénéfique pour tous. Il y a plus de dix ans maintenant, nos employés ont créé un « Social Committee » et aujourd’hui nous avons différents projets et actions mis en place tout au long de l’année :
Nous organisons des soupes populaires dans le quartier de Katutura en partenariat avec l’association Family of Hope qui vient en aide aux enfants défavorisés ou orphelins.
Nous cuisinons et servons des dîners dans une maison de retraite également située dans le quartier populaire de Katutura.
Nous récoltons des habits, jouets et objets courants de seconde main auprès des employés et des voyageurs que nous accueillons et les distribuons lors de soupes populaires ou les vendons à tout petit prix pour récolter des fonds et financer de nouveaux projets.

Les autres projets durables qui nous tiennent à cœur sont :

Le Rhino Tracking

Notre circuit Moringa inclut une excursion avec un ranger local sur les pistes reculées du Damaraland à la recherche des rhinocéros qui vivent en toute liberté dans cette région. Nous proposons également sur demande cette activité dans nos circuits guidés privés.
Matiti Safaris travaille avec les rangers locaux afin de leur fournir du travail, un revenu et de les impliquer dans la protection des rhinocéros. Les rangers reçoivent une formation donnée par le SRT (Save the Rhino Trust). Lorsqu’ils partent avec nos clients en excursion, cela leur permet de donner d’importantes informations aux clients sur l’environnement, leur travail, les rhinocéros mais aussi de faire une patrouille anti-braconnage en bénéficiant de notre véhicule pour cela et de noter tout comportement anormal afin de le reporter ensuite.
En 2018, l’association Save the Rhino Trust travaillant dans la région du Kunene, est fière d’annoncer la naissance de 9 rhinocéros dans la région Erongo-Kunene, contre 0 rhinocéros tué par des braconniers.
Une victoire dans la protection de ces animaux et la lutte contre le braconnage !  Rhino + 9 ; braconniers 0

Go Green Matiti #Less Plastic Is Fantastic

Durant nos circuits guidés, pour augmenter la qualité de notre service, nous offrions chaque jour de l’eau en bouteille à nos voyageurs, qui était jetée une fois vide. Afin d’augmenter notre engagement écologique, et de diminuer la pollution plastique en Namibie, les voyageurs recevront désormais une gourde en cadeau de bienvenue, qu’ils pourront remplir au fur et à mesure du circuit avec de l’eau filtrée stockée dans des containers de 10 litres. Chaque container est stérilisé et réutilisé. Le guide assistera les clients pour remplir leur gourde.
Si vous le souhaitez, pour un coup minime nous pouvons faire mettre votre logo avec celui de Matiti Safaris sur les gourdes. Merci de me contacter si cela vous intéresse.

 Let’s keep Namibia picture perfect !

TOSCO Sponsorship

TOSCO (Tourism Supporting Conservation – https://tosco.org/) est une association namibienne à but non lucratif œuvrant pour le tourisme responsable et la préservation de l’environnement. TOSCO soutient la recherche scientifique, ceux qui vivent avec la faune sauvage et la sensibilisation du public pour le bénéfice de tous.
TOSCO s’engage à augmenter l’impact positif du tourisme sur trois niveaux :

  • Économique en créant des bénéfices financiers pour les communautés locales
  • Social en prenant soin et en respectant les cultures traditionnelles et locales
  • Environnemental en protégeant la biodiversité (faune, flore, paysages)

Matiti Safaris est le sponsor le plus important de l’association TOSCO afin de soutenir ses différents projets : participation aux frais d’adhésion annuelle, versement volontaire d’une contribution fixe pour toute personne faisant des excursions dans les rivières de la région du Damaraland (notamment à la recherche des éléphants du désert, c’est-à-dire dans l’Huab/Aba-Huab, Hoarusib, Ugab…), financements de projets ponctuels au cours de l’année (ex : pour le comptage de la faune sauvage en partenariat avec le Ministère de l’Environnement et du Tourisme et autres associations).
En plus d’un apport financier, l’équipe de Matiti Safaris participe bénévolement et de façon régulière aux événements/projets organisés durant l’année.

Go Green Matiti #CarbonOffSettingProgram

Durant nos voyages, il ne nous viendrait pas à l’idée de laisser des détritus derrière nous et nos guides font de leur mieux pour sensibiliser nos voyageurs sur ce sujet. Mais il existe aussi une pollution invisible qui est celle des moteurs de nos véhicules. Le tourisme est aujourd’hui responsable à hauteur de 8% du réchauffement climatique mondial. Mais la bonne nouvelle est que des arbres peuvent nettoyer cela après notre passage. Encore faut-il les planter !

En 2018, Matiti Safaris a pris part de façon active au projet de pépinière avec TOSCO et ELOOLO PERMACULTURE (http://www.tosco.org/cleantravel).
Depuis le 1er janvier 2019, cette formule est automatiquement incluse dans tous nos départs garantis (Moringa, Visions Australes et Namibian Highlights). Et proposée en option pour nos circuits en version privative aux agences.
Le but étant de proposer à nos/vos voyageurs de réduire leur empreinte écologique en Namibie durant leur voyage en sponsorisant des arbres qui seront plantés afin de compenser les émissions de carbone émises par les véhicules.  
C’est un pas majeur vers un tourisme plus durable que nous prenons ensemble. Un opérateur touristique tel que Matiti Safaris se doit de montrer l’exemple et de prendre ses responsabilités dans le combat contre le réchauffement climatique.

ELOOLO PERMACULTURE plante des arbres dans les communautés locales et les écoles qui en prennent soin et en bénéficient directement à l’aide d’un système de permaculture mis en place, permettant aux familles de profiter des différentes cultures pour se nourrir et en retirer des revenus complémentaires.

Investissement dans l’immobilier

Investir dans l’immobilier est une façon d’aider les personnes à gagner un revenu supplémentaire. Il est difficile pour une personne en Namibie de pourvoir acheter seule sa maison. Nous avons alors créé des associations d’employés avec l’aide de Matiti Safaris pour permettre aux personnes travaillant chez nous d’investir et d’être actionnaires à hauteur de leurs moyens dans l’immobilier.  Une fois cet investissement payé, ils retirent des bénéfices des loyers payés.

Bien sûr nous pouvons toujours mieux faire, et on continue à chercher de produits locaux intéressants à soutenir et des nouveaux projets à développer (toutes vos idées sont les bienvenues !). Le plus important, c’est de commencer quelque part, et d’avancer dans la direction qui bénéficie à tout le monde !

La microaventure, le voyage en bas de chez soi

Par Hélène Michel, Dominique Kreziak et Marielle Salvador

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Jeudi 27 juin 2019. Les vacances ne sont plus très loin et la canicule est déjà là. À Grenoble, le thermomètre affiche 38 degrés. Dans le cadre d’une recherche sur les transformations du territoire, nous partons sur le terrain collecter des données. Direction le sommet du mont Aiguille, en Isère pour analyser le phénomène de microaventure révélé par Alastair Humphreys. Pour cet aventurier, auteur et conférencier anglais, il s’agit d’une aventure « courte, proche de chez soi et qui s’insère dans le quotidien ». Une heure de route, quelques heures de marche et d’escalade… nous voilà à 2 000 mètres d’altitude. Nous ne sommes pas les seuls à avoir eu cette idée : pourquoi sont-ils là ? Sont-ils en congés ? Ont-ils volé un moment dans leur emploi du temps ? La conversation s’engage. Ces neuf personnes, perchées sur le haut plateau, illustrent sans s’être concertées plusieurs tendances du tourisme mondial.

Deux microaventuriers au sommet du Mont Aiguille, en juin 2019. Hélène Michel, Procurée par l’auteur

Tout d’abord, elles cherchent à fuir le tourisme de masse qui envahit les sites réputés comme Barcelone et ses 32 millions de visiteurs annuels (vingt fois sa population) ou Venise qui tâche de réguler ce flux en taxant les visiteurs débarquant des bateaux de croisières ou en réglementant sévèrement les comportements. Elles ont aussi le point commun de n’avoir parcouru qu’une heure de route depuis leur domicile. Faire du tourisme sur son propre territoire, c’est la définition même du « staycation » (contraction de « to stay » pour résider et « vacation » pour vacances).

Raisons économiques, mais aussi idéologiques, dans un contexte climatique où prendre l’avion pour un oui ou pour un non n’est plus perçu d’un très bon œil – on a vu se développer en Suède depuis un an le « flygskam », qui désigne la honte émergente de prendre l’avion.

De ce groupe, aucun d’entre eux n’est en vacances. Certains ont posé une demi-journée, d’autres travaillent de nuit. Il s’agit davantage d’un mode de vie, que des chercheurs ont qualifié de touristification du quotidien : le but, insérer des temps de loisirs et vacances dans des interstices de leur emploi du temps.

Même endroit, même activité, même heure : ils sont tous venus en montagne pour enchanter leur quotidien. Pourtant, trois expériences bien différentes sont en train de se jouer.

Enchanter son quotidien en trouvant des failles temporelles

Nous rencontrons d’abord trois personnes, deux femmes et un homme, trentenaires, venus de Grenoble pour grimper, avec pour seul chargement leur sac et leurs cordes d’escalade. Ils rentreront ce soir chez eux. Leur source d’inspiration ? la carte IGN et les topos d’escalade décrivant les sites, voies et les degrés de difficultés. Le levier de motivation : l’activité avec le plaisir décuplé de l’école buissonnière, car « cela a meilleur goût en semaine ». La photo du jour ? Un sac de corde au pied de la voie comme pour dire : « Regardez ce que je fais pendant que vous bossez ! ».

Lectures et sources d’inspiration du premier groupe, centrées sur la découverte du territoire et l’optimisation du temps. Montage réalisé par Hélène Michel

Il y a chez eux une volonté d’optimiser leur journée en tirant le meilleur parti d’un planning très contraint. Cette approche implique de chasser les temps morts ou peu intéressants du quotidien, en y intercalant des activités signifiantes. Ce désir d’être performant ou accompli sur tous les plans serait le propre des nouvelles classes dominantes, dites « classes aspirationnelles ».

Au XIXe siècle, les classes sociales supérieures sont notamment composées d’oisifs qui peuvent jouir librement de leur temps, en dépensant de façon improductive et ostentatoire temps et argent. Aujourd’hui les nouvelles classes dominantes travaillent au contraire intensément pour atteindre leurs positions et manquent de temps à consacrer à leurs loisirs. Il en devient encore plus précieux, il ne faut donc en aucun cas le gaspiller.

Les individus recherchent l’accomplissement et le sentiment de progression personnelle même dans les activités de loisirs. Les expériences originales permettent de se sentir productif et efficace dans l’usage de son temps. Au matin la vie normale reprend, mais avec la dimension supplémentaire d’avoir accompli quelque chose. Cela peut ressembler à la volonté d’intégrer une heure de sport dans son emploi du temps quotidien, au prix de prouesses d’organisation.

Le rapport à la nature y rajoute une dimension supplémentaire. Ainsi, à proximité des domaines skiables, certains pratiquent le ski de randonnée de 5 à 7h le matin avant d’aller travailler. Comme s’ils avaient ajouté à leur liste de tâches quotidiennes ou hebdomadaires une ligne de plus, consacrée à une sortie nature ou une micro-évasion.

Le « staycation », nouvelle tendance touristique

Ces comportements interrogent sur les phénomènes touristiques qui se développent aujourd’hui. La recherche de rupture du quotidien est à rapprocher avec le phénomène de « staycation » qui devrait s’amplifier dans les années à venir. Il s’illustre par des pratiques alternatives, par exemple des personnes choisissant de vivre « en mode vacances » dans un mobilhome, juste à côté de leur résidence principale.

À la croisée du tourisme lent, du tourisme responsable et du tourisme créatif, le « staycation » illustre une caractéristique de la post-modernité. Le post-tourisme se définit « à partir d’une logique interne de jeu, de posture oblique et de transgression ludique (se) jouant de l’artifice, de l’inauthenticité et du pastiche assumés, du choc des contraires, voire de la provocation et même du cynisme ». Il s’agit bien là de l’homo consumericus qui serait « à l’affût d’expériences émotionnelles et de mieux-être, de qualité de vie et de santé, de marques et d’authenticité, d’immédiateté et de communication ».

Ainsi, dans le sillage de l’économie de l’expérience, le « staycation » répond à une quête d’authenticité recherchée par les touristes d’aujourd’hui, à l’instar des mouvements de « couchsurfing » (hébergement gratuit entre particuliers pour une nuit ou quelques jours), ou des « greeters » (bénévoles qui accueillent gratuitement des touristes pour leur montrer leur ville de manière personnelle et originale).

Collectionner les expériences mémorables

Sur ce même sommet, une nouvelle rencontre avec un groupe composé de deux hommes et de deux femmes, entre 25 et 40 ans. Un vigile qui travaille en horaire décalé, trois autres qui interviennent dans le tourisme sportif et profitent du calme d’avant-saison. Ils se connaissent mais sans plus, puisqu’ils sont entrés en contact sur un site qui met en relation les passionnés d’activités en plein air. Venus exprès du département voisin, ils vont dormir là-haut. Leur source d’inspiration ? Un guide des plus belles expériences à vivre qui, à renfort de belles images, sélectionne et hiérarchise des lieux et activités. Les sentant impatients, nous les laissons passer à la montée.

Nous les recroisons en haut, installés sommairement pour la nuit. Pressés de monter, ils le sont tout autant de descendre. GoPro fixée sur le casque, ils prennent beaucoup de photos d’eux en action, en plein rappel, encordés ou arrivant au sommet. Ils feront un montage pour le partager avec leur communauté.

Des professionnels du tourisme se sont lancés sur ces créneaux touristiques : Savoie Mont Blanc Tourisme proposait cet été de vivre une aventure par jour. L’industrie du livre touristique ne s’y est pas trompée non plus : les étals des librairies exposent désormais les « Les 1 001 randonnées qu’il faut avoir faites dans sa vie », ou les « 1 000 lieux à visiter avant de mourir », best-seller des ventes. Cette injonction se formalise souvent avec un chiffre symbolique (100, 1 000, 1 001) ou lié au nombre de semaines ou de jours dans l’année, et une mise en tension temporelle. Cette injonction apparaît de plus en plus tôt, par exemple avec des aventures à absolument faire avant ses 12 ans !

Lectures et sources d’inspiration du groupe privilégiant la performance et la collection d’expériences mémorables. Montage réalisé par Hélène Michel

Il s’agit de se fabriquer des souvenirs qui entreront dans la catégorie des expériences mémorables. Finalement, vivre des expériences uniques, n’est-ce pas la promesse faite par toute bonne agence de voyage ou de ces guides ? Ce qui n’est pas sans rappeler l’injonction de posséder formulée il y a 10 ans par Jacques Séguéla (« Si à 50 ans, tu n’as pas de Rolex, tu as raté ta vie »). Derrière cela, l’idée sous-jacente est la recherche d’une performance à la fois physique (courir un marathon) et mentale (dépasser ses peurs, accepter la prise de risque).

D’un point de vue académique, le concept d’expérience dans le tourisme a fait l’objet de multiples recherches et est même devenu central en management du tourisme. Une expérience mémorable comprend trois dimensions clés : une dimension personnelle et psychologique liée à l’émotion, une dimension culturelle liée à l’environnement, et une dimension relationnelle. L’intensité de cette dernière sera fonction du contexte mais également d’un élément qui viendra en définitive la rendre plus mémorable.

L’expérience touristique mémorable est donc teintée de subjectivité. Elle participe au bien-être de l’individu, à sa transformation personnelle, à un apprentissage. Nous sommes désormais dans une « économie de l’expérience » où les acteurs du tourisme s’organisent pour répondre à cette recherche par l’individu d’un authentique soi à deux pas de chez lui.

Faire de sa propre expérience un jeu

Le dernier groupe rencontré est composé de deux hommes trentenaires, collègues et amis. Infirmiers, ils profitent d’un emploi du temps décalé pour faire un « hold up », selon leur propre expression. L’un des deux, plus expérimenté, guide l’autre.

Les courses mythiques, la performance, il y a largement goûté. Cela ne l’intéresse plus vraiment. Son plaisir est de venir avec un ami pour passer la nuit en haut. Ce sont les seuls à avoir apporté une tente, les autres dorment à la belle étoile. Ils n’ont pas oublié non plus le saucisson artisanal et partagent volontiers une bonne bouteille de vin. Ils prennent le temps d’admirer, de venir discuter, de prendre le café le lendemain avant de redescendre. Même s’ils sont arrivés au sommet, leur but n’était pas de grimper en haut du mont Aiguille mais de créer un moment à part, teinté de plaisirs minuscules qui participent à rendre ce dernier exceptionnel. Il peut s’agir par exemple d’amener de la très bonne nourriture ou des objets (une guirlande pour illuminer la tente ou des verres à pied pour déguster le vin) qui deviennent totalement incongrus dans un tel lieu.

Leurs sources d’inspiration ? Des livres, podcasts et communautés sur les réseaux sociaux qui remettent l’expérience en jeu. Ces derniers proposent, par exemple, de tirer à pile ou face la direction que vous allez prendre, de vous laisser guider par une odeur dans un marché aux poissons, près d’une boulangerie, etc.

Livres et sources d’inspiration du groupe privilégiant la remise en jeu du territoire. Montage réalisé par Hélène Michel

Cette démarche permet de revisiter un territoire familier en le transformant en terrain de jeu. Le philosophe Johan Huizinga qui a théorisé le jeu dans les années 1930, expliquait qu’en jouant à des jeux, on créait « des mondes temporaires au cœur du monde habituel où des règles spéciales s’appliquent ». La microaventure, offre un monde temporaire permettant d’expérimenter de nouvelles actions sans redouter des conséquences fortes. Quelle que soit l’activité ou son intensité, il existe une possibilité de repli, une échappatoire permettant de rentrer le soir, en sécurité et au chaud. Pour que le jeu fonctionne, il est indispensable d’intégrer au moins une règle ou contrainte qui fera de l’activité une véritable quête et du participant ou touriste un héros.

L’objet incongru

Dans l’émission « J’irai dormir chez vous », Antoine de Maximy visite ainsi des lieux déjà connus, mais en s’imposant la contrainte de se faire inviter à dormir chez l’habitant, au fil de rencontres souvent étonnantes. Dans « Nus et culottés » Nans et Mouts commencent leur périple (faire griller des chamallows sur un volcan ou aller dormir au sommet du mont Aiguille) à des centaines de kilomètres de l’objectif… et entièrement nus !

Nus et culottés, une émission de télévision qui suit deux aventuriers se lançant des défis… nus ! CC BY-NC-ND

Dans l’approche narrative, le schéma actanciel définit les rôles et relations et souligne l’importance de l’adjuvant, ce personnage ou objet que le héros mobilise pour accomplir sa quête. Ainsi la sensorialité du moment peut être amplifiée par des objets utilisés hors de leur contexte habituel de consommation afin de servir, non seulement la création d’une expérience unique, mais aussi une esthétisation du lieu pour alimenter le caractère exceptionnel du moment. Par exemple, apporter des verres à pied pour déguster du bon vin, illuminer la tente d’une guirlande. Cette expérience devient aventure fabuleuse puisqu’invraisemblable de par cet objet devenu incongru.

Le tourisme comme expérience créative est apparu dans les années 1990 dans les pays anglo-saxons comme la Nouvelle-Zélande, l’Australie ou le Canada. Il s’agit d’un « un tourisme qui offre aux touristes l’opportunité de développer leur potentiel créatif à travers la participation active à des cours ou des expériences d’apprentissage caractéristiques de la destination qu’ils visitent ».

Même si chaque pays semble avoir une définition différente du tourisme créatif, il existe des traits communs : participation active, expériences authentiques, développement du potentiel créatif et développement des compétences imaginées à partir de moments de la vie quotidienne.

Avec la pratique apparaissent les dérives : certains imagineront des règles du jeu de plus en plus dangereux, d’autres chercheront des défis en recourant à des objets de plus en plus incongrus, tel ce Britannique ayant emmené, puis abandonné un rameur au sommet du Mont Blanc. Comment dès lors accompagner la microaventure tout en respectant et valorisant le territoire ?

Des machines à voyager… sans partir loin

« Les vacances, c’est d’abord trouver un ailleurs », souligne le sociologue Jean‑Didier Urbain. Ce nouvel univers peut se créer par un simple changement d’habitudes, une désynchronisation de la vie quotidienne : « adopter des modes de vie différents, en se levant tard, en pique-niquant dans le jardin ou même porter des vêtements plus détendus ». L’objet incongru devient alors un moyen de cette désynchronisation. Au-delà d’aider à vivre et ressentir l’expérience en l’orientant et l’amplifiant, cet objet peut aussi servir à ancrer le souvenir en laissant une trace.

Dans le Grand Canyon, Elyssa Shalla, garde du parc, a mené en 2018 une expérimentation. Elle a installé une vieille machine à écrire à un point de vue accessible, après dix kilomètres de randonnée « pour voir ce qui se passerait… ». Elle avait mis la note suivante : « Cher randonneur, bienvenue au point de vue du plateau. Vous avez fait un long chemin. Asseyez-vous un moment et relaxez-vous. Regardez tout autour de vous. Qu’est-ce que cela représente pour vous ? »

En trois jours, 76 messages ont été récoltés. La conclusion d’Elyssa Shalla : « Nous devons créer plus d’opportunités pour que les gens s’arrêtent, pensent et ressentent en même temps, puis leur donner un moyen de partager leur expérience ». Cette expérience frugale, ponctuelle permettait au randonneur d’interagir et de contribuer en laissant une trace. Elle se cantonnait à un lieu unique, un seul point de vue, sur un lieu déjà extrêmement renommé et fréquenté. En l’état la reproductibilité de l’expérience et la valorisation du matériau collecté étaient limitées.

Comment, à partir de cette expérience, imaginer un dispositif mobile qui génère de l’acuité sur des lieux moins connus ou fréquentés, pour renouveler le regard sur l’expérience et incarner la microaventure ? Des propositions émergent. Parmi elles, le Fabularium. Pensé par une chercheuse et un microaventurier des Alpes, ce dispositif se présente comme un bureau mobile démontable et transportable à dos d’homme, tels les colporteurs d’autrefois emportant marchandises et histoires d’une vallée à l’autre. Il peut être disposé dans des lieux étonnants (au sommet d’une montagne, les pieds dans l’eau, sous la neige). Une fois monté, ce bureau devient un « objet spectaculaire », amplificateur de l’expérience. Le design a ainsi été imaginé pour figurer une machine à voyager, rendant sa présence intrigante pour les personnes le croisant sur leur chemin.

Fabularium : n.m. machine à voyager… sans partir loin. Source : Grenoble Ecole de Management, réalisée par Yocot Vidéo.

Enfin, il s’agit d’un laboratoire « grandeur nature » permettant de collecter des données de recherche, les personnes utilisant une machine à écrire pour donner corps à leur expérience, puis postant leurs lettres dans une boîte prévue à cet effet. Ces données serviront à mieux comprendre le phénomène de microaventure, la nature de l’expérience vécue sur différents territoires et les motivations des participants.

Simultanément, nous analyserons le rôle d’un objet intermédiaire, voire spectaculaire, dans le changement d’attribution d’un espace (par exemple en le comparant à l’introduction des pianos ou des machines à histoire dans les gares). Les résultats de cette étude serviront aux acteurs du territoire (tourisme, mobilité, etc.) dans leurs stratégies d’aménagement et de valorisation.

Hélène Michel, Enseignant-Chercheur – Gamification & Innovation, Grenoble École de Management (GEM)Dominique Kreziak, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Savoie Mont Blanc et Marielle Salvador, Enseignant chercheur, comportement du consommateur, marketing de l’alimentation, INSEEC School of Business & Economics

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

VinoMundo ☀

Par Pierre Boyer – Temps de le lecture : 4 min


QUI EST PIERRE ?
► Fondateur Terra Andina Peru, fondateur Terra Patagonia Argentina; co-fondateur Terra Group,… associé Togezer, Toogonet, et quoi encore ? Directeur commercial de Terra Group et de Vino Mundo (www.voyages-vin.fr), la collection de voyages autour du vin, son chouchou. Le voyage c’est aussi la convivialité, la rencontre, le terroir et il conjugue admirablement avec une bouteille de Malbec, le coup de coeur de l’épicurien Pierre, since 1967.


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Quand la passion du voyage rencontre celle du vin

Vingt ans déjà … que j’ai eu la chance grâce à mon ami et fidèle associé Fabrice Pawlak de participer à un projet de création d’une agence spécialisée sur le voyage sur-mesure en Bolivie. C’était le début de Terra.

A l’époque, j’étais consultant free-lance en système d’information sur un progiciel qui commençait à pointer son nez en France et qui s’appelait SAP… pas grand monde connaissait ce nom qui est désormais une référence et marque mondiale et a d’ailleurs attiré dans son sillage de nombreux jeunes diplômés.

Métier passionnant qui m’a permis de voyager pas mal en Europe, découvrir de nombreux horizons professionnels et d’enchaîner aussi quelques repas d’affaires. J’ai découvert à cette occasion que le vin est un élément clé du repas. Il permet de briser la glac117e quand des sujets délicats sont à aborder avec des clients et il détend souvent l’atmosphère. Il s’avère être aussi un vrai compagnon de discussion pour les passionnés du sujet. Il crée tout simplement de la convivialité, du vivre ensemble tant à la mode aujourd’hui !

En 1999 en Bolivie,  le vin n’est pas au centre des débats. Il n’existe qu’une seule région celle de Tarija qui produit du vin. Un beau rouge plutôt charpenté « le Concepción » issu de la vallée portant ce nom est un des rares vins fins mono-cépage que l’on peut trouver à La Paz. Nous débutions l’agence et ma fois le Concepción passait pas mal avec les « empanadas » et les brochettes de cœur de bœuf que nous mangions parfois dans la rue !

Début 2000, je quitte la Bolivie pour monter la deuxième agence deuxième Terra à Lima au Pérou. Le vin n’est pas non plus leur fort. Là-bas la boisson nationale est plutôt la bière et le Pisco planté à 200 kms au sud de Lima près de la ville portuaire portant ce nom. En revanche, le Pérou possède une gastronomie extrêmement riche et variée suivant les régions et est considérée désormais comme une des meilleures cuisines du monde.

                                        
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J’ai vécu 6 ans au Pérou et j’ai donc eu l’occasion de tester de nombreux plats régionaux et d’y associer les vins chiliens qui s’exportaient en grande quantité au Pérou. L’occasion aussi de faire de très belles rencontres humaines à Lima et à Cusco où se plantent désormais des vignes en altitude en particulier dans la vallée sacrée des Incas !  Les vignes d’altitude de Fernando Gonzales Lattini qui possède un domaine viticole à 2800 mètres est tout à fait remarquable à cet égard et permet une vraie rencontre humaine dans une région où l’on s’attend à tout sauf à rencontrer un viticulteur !

Dans la foulée, j’ai voyagé pendant 7 ans en Argentine pour y créer l’agence Terra Argentina. On ne présente plus le pays du Malbec cultivé dans la région de Mendoza, désormais mondialement réputée… Ce cépage cultivé originellement en France dans la région de Cahors accompagne avec délice les interminables « asados », sorte de barbecue argentin géant où chacun vient « à la canasta » avec sa viande et sa bouteille de vin…Histoire de refaire le monde pendant quelques heures …et Dieu sait que les Argentins sont bavards ! Évidemment ce rituel a lieu, été comme hiver, au minimum TOUS les dimanches de l’année (parfois aussi le samedi) et c’est LA rencontre festive de la semaine ! A consommer sans modération !

Tous ces nombreux moments vécus de convivialité m’ont conforté dans l’idée qu’il fallait créer une collection de voyages autour du vin, du voyage et  de la gastronomie mettant en avant la rencontre avec les hommes et les femmes qui créent ce magnifique breuvage.

Vino Mundo, c’est donc simplement l’aboutissement d’une idée qui est de réunir deux passions celle pour le voyage et celle pour les vins. Passion aussi et admiration surtout pour les femmes et les hommes qui travaillent à l’élaboration de cet élixir mondialement partagé.

                                        
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Découvrir un nouveau vin, c’est se plonger dans un univers sensoriel souvent totalement inconnu. Visuellement, le premier contact en dit déjà long… puis vient la découverte olfactive qui nous emmène parfois très loin de ce que l’on connaît vers des terroirs qui nous « dépaysent » totalement !

Quand vient le moment de goûter le vin, on apprend alors à deviner les saveurs spécifiques de ce terroir que l’œnologue a cherché à nous faire découvrir.

Tous les sens sont en émoi. Puis vient le moment de la conversation inévitable autour de la dégustation d’un verre de vin…

Le vin est clairement un catalyseur de convivialité. Bref, il aiguise le plaisir d’être ensemble en famille, entre amis, faire de nouvelles rencontres et simplement partager de bons moments de la vie !

C’est cela aussi une des « promesses » du voyage. On part parfois pour s’aérer la tête, se dépayser,  découvrir et apprendre à connaître de nouveaux modes de vie, ou plus simplement se relaxer et prendre soin de soi !

Finalement Voyage et Vin sont des cousins. Ils en appellent au plaisir des sens et c’est peut-être simplement cela leur grande vertu commune. Ce plaisir est propre à chacun et nous essayons grâce à cette collection de trouver quelle est votre idée du sens du voyage et d’adapter celui-ci en conséquence !

Tous nos experts locaux francophones sont basés en Australie, Argentine, Bolivie, Chili, Pérou, Espagne, Portugal et Croatie etc. Ils sont à votre écoute et cherchent à donner du sens et de la convivialité à votre voyage.

Que vous soyez célibataire, en couple, en famille ou avec un groupe d’amis déjà constitué, vos attentes sont écoutées, étudiées et nous faisons au mieux pour répondre à votre passion sur le voyage et le vin.

Pour nourrir la réflexion, nous vous invitons à découvrir quelques-uns des séjours viticoles sur nos destinations qui peuvent vous donner des idées pour un prochain voyage sur www.voyages-vin.fr !

Cette collection commencée en 2018 s’inscrit dans une série de collections de voyages made by Terra et est également commercialisée via des salons spécifiques comme le salon Festivitas , LE salon du Vin , du voyage et de la gastronomie en Alsace .

Bon Voyage et Bonne Santé !

Réduire l’eco-empreinte de notre activité

Nous sommes partis à la rencontre d’entrepreneurs dans le voyage aux convictions bien tranchées sur le sujet, ils ont mis en place des actions concrètes dans leur entreprise, pour leurs voyageurs. Nous vous les partageons ici, pour vos donner des idées et également pour en débattre, n’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires pour chaque article.